Chapitre 2, p. 22

22 HISTOIRE
action seroit le plus malheureux de
tous les hommes, bien loin de se
voir comblé d’honneur & de fortune.
Mais, Seigneur , poursuit-il, com¬
ment se peut-il faire que le Ciel
vueille recompenser de tant de biens
un si grand forfait , & prenne la peine
même de declarer sa volonté à ce su-
jet par des signes celestes ? Ha ! mon
fils , dit le Comte , Dieu fait tout
pour sa gloire , & sa providence est
impenetrable. Peut-être que celui qui
commettroit ce crime le feroit par ac¬
cident, & delivrant la terre d’un Sou¬
verain qui peut n’étre pas agreable à
l’Eternel pour quelques pechés incon¬
nus , le Ciel voudroit recompenser de
mille felicités une action qui devien¬
droit meritoire envers Dieu. Telle
fut l’entreprise de Judith , & plu¬
sieurs autres de même nature.
A peine le Prophete finissoit son
discours , qu’ils entendirent brosser à
travers les buissons , & rompre les
branches ; ensuite ils aperçurent le
même sanglier qu’on avoit chassé, &
que sa playe agitoit ; la lumiere du feu