Chapitre 1, p. 12

12 HISTOIRE
toûjours de grands égards pour son Pe¬
re ; mais il lui arriva de terribles infor¬
tunes, & dont on trouve le recit dans
l’Histoire de Geoffroi à la Grand-dent,
fils de Melusine, de qui nous parle-
rons ci-aprés.
Pour en revenir à Pressine, elle se
transporta en l’Isle Perduë. Cette Isle
se nommoit ainsi, parce qu’aucun
homme ne la pouvoit trouver que par
Hazard, aprés même y avoir été plu-
sieurs fois : Elle y éleva ses filles jus¬
qu’à l’âge de quinze ans ; & tous les
matins elle les menoit sur une haute
montagne d’où elle découvroit l’Al-
banie, & leur disoit , en pleurant :
Mes Enfans, vous voyés ce beau Païs,
il vous a donné la naissance, vôtre
Pere y regne & vous y eussiés vêcu
heureuses, si ce malheureux homme
n’avoit point violé la promesse qu’il
m’avoit faite.
Pressine avoit tant de fois tenu ce
discours à ses Filles, qu’étans parve-
nuës à l’âge que j’ai dit , Melusine,
l’aînée, demanda un jour a sa mere ce
que leur Pere avoit fait pour les priver