6 septembre 1877

Paris, 6 septembre [18]77, jeudi matin 10 h.

Il est bien fâcheux, mon cher bien-aimé, qu’on ait interrompu ton sommeil ce matin puisque tu n’avais pas dormi dans la nuit. Si, au lieu d’être isolé, comme tu l’es, de l’appartement, tu y demeurais, tu n’aurais que ton cordon de sonnette à tirer pour avoir ton service à toute heure de jour et de nuit. Service dont tu peux avoir besoin d’un moment à l’autre. Ce n’est pas la première fois que cet inconvénient de ton isolement me frappe et m’inquiète, mais plus ça va plus je suis tourmentée. Il est bien malheureux qu’on ne puisse pas instantanément remédier à ce danger imminent. Cependant il ne s’agirait que de déménager, c’est-à-dire sacrifier quelque argent ; il me semble que ta santé et peut-être ta vie valent bien un sacrifice quel qu’il soit. Tout le monde gagnerait à ce changement, sans parler de ma tranquillité qui mérite bien un peu que tu en tiennes compte. Et à ce sujet, mon grand bien-aimé, il est bien entendu que si tu vas à l’enterrement de Thiers [1] j’irai aussi, quand bien même je ne pourrais pas être tout près de toi. J’ai pensé que peut-être le bon Lesclide voudrait peut-être me protéger dans la foule, surtout si tu le lui demandais. Mais, dussé-je n’avoir personne avec moi, il est bien entendu que je te suivrai de corps, de cœur et d’âme ce jour-là.

BnF, Mss, NAF 16398, f. 243
Transcription de Guy Rosa