Université de Rouen
Cérédi - Centre d'étude et de recherche Editer-Interpréter
IRIHS - Institut de Rechercher Interdisciplinaire Homme Société
Université Paris-Sorbonne
CELLF
Obvil

Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

Accueil > Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo > 1852 > Février > 2

Bruxelles, 2 février 1852, lundi après-midi, 3 h.

Que l’arrivée de ton fils soit bénie, mon adoré, puisqu’elle te rend une partie de toi-même Et qu’elle te fera supporter l’exil avec moins de tristesse. Mon premier mouvement en lisant la lettre de ce cher enfant a été de la joie en pensant à toi ; le second du regret en songeant à nos douces soirées et à nos charmantes nuits finies pour bien longtemps, peut-être pour toujours. Oh ! non je ne veux pas accepter cet avenir-là, mon pauvre adoré, j’ai besoin au contraire d’espérer que quelque heureux incident nous rapprochera plus près encore l’un de l’autre sans te coûter ni un regret ni un remordsb. En attendant j’ai bon courage et pleine confiance, l’arrivée de ton Charles, loin de nous nuire dans notre amour, ne peut que nous porter bonheur. C’est une douce superstition que j’ai toujours euec car c’est pour la date de sa mise en liberté que je me suis confiée à toi sans aucune arrière mauvaise pensée. Pauvre père, tu vas être bien heureux demain malgré le souvenir de tes pauvres chers absents. Il semble que tu les reverras tous à la fois dans la personne de ce beau et bon jeune homme car ils se ressemblent tous et puis il sera tout imprégné de leurs sentiments, de leur tendresse, de leurs âmes. Oh, mon pauvre bien-aimé, je voudrais que ce fût ce soir tant j’ai besoin de ton bonheur pour être heureuse moi-même. Hélas quel regret que nous n’ayons pas pu l’introduire ici. Mais il n’y faut pas songer. Je me résigne du mieux que je peux avec l’espoir que le bon Dieu me rendra bientôt cette occasion perdue. D’ici là mon pauvre bien-aimé, il m’arrivera plus d’une fois de murmurer contre la légèreté compromettante de ces excellentes femmes qui seraient parfaites si elles n’étaient pas extravagantes. Mon Victor, puisque nous passerons encore une bonne soirée ensemble, je veux l’employerd tout entière à te sourire et à t’aimer comme si elle ne devait jamais finir.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16370, f. 53-54
Transcription de Bénédicte Duthion assistée de Florence Naugrette

a) « rapprochera ».
b) « remord ».
c) « eu ».
d) « emploier ».

SPIP | | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0
(c) 2018 - www.juliettedrouet.org - CÉRÉdI (EA 3229) - Université de Rouen
Tous droits réservés.
Logo Union Europeenne