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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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30 septembre 1881, vendredi, 3 h. ½ du soir

Mieux vaut tard que jamais, dit le proverbe, et c’est aussi mon opinion ; et malgré l’heure avancée de la journée, je me mets résolument à ma restitus pendant que de ton côté tu ravaudes dans tes armoires. Et à ce propos, je te fais souvenir que tu n’as pas encore payé ton argenterie. Il est vrai que tu ne t’en esa pas encore servi non plus ; mais je te fais souvenir de cette [somme] de 1036 F. pour que tu ne l’oublies pas. Quant à ce que tu as pris pour une porte close tout à l’heure, c’était tout à fait inconsciemment de ma part. J’étais en train d’achever l’addition, trop souvent interrompue par les enfants depuis ce matin, de la très longue dépense d’hier, ce qui explique mon absorption dans cette fatiganteb occupation. Mais ce qui est différé n’est pas perdu et j’aurai probablement plus d’une occasion de voir les deux artistes en question. De ton côté, mon cher petit homme, as-tu pensé au mois de Mme Lockroy ? Dans tous les cas elle n’attendrait pas longtemps après puisqu’elle revient lundi pour déjeuner.
Je crois que l’heure est venue d’envoyer chercher la voiture, surtout si nous la prenons pour deux heures. C’est ce dont je vais aller m’informer près de toi séance tenante, après t’avoir remis par A plus B mon cœur et tout ce qu’il contient de bon et mon âme toujours prête à s’envoler de mon corps depuis déjà longtemps et que, loin de te demander un supplément, comme il m’est arrivé souvent à cause des excédents de dépense de table, je te dispense aujourd’hui, non seulement de payer la blanchisseuse, mais même de me donner les deux cents francs obligatoires : ATTRAPÉ !!!d
Voilà un mois déjà que j’ai payé, à moi toute seule, toutes les bougies, tous les blanchissages, toutes les voitures, tous les sirops, tous les remboursements de timbres à Lesclide, toujours très lourds, et que j’ai petit à petit thésaurisé la somme nette de deux cents francs. Que dites-vous de cette gestion ? Êtes-vous content môsieu ? Et ne vous laissez-vous pas attendrir en me permettant de vous dire le mot de la fin des fins : les petites cuillères  !
Cher bien bien-aimé, je serai bien contente si tu me donnes cette petite satisfaction d’avoir triomphé une seule fois dans ma vie de ta résistance. Je te souris dans tous les cas et je t’adore quand même.

[Adresse]
Monsieur Victor Hugo

BnF, Mss, NAF 16402, f. 219-220
Transcription de Caroline Lucas assistée de Florence Naugrette

a) « ne t’en n’es ».
b) « fatiguante ».
c) « obligatoire ».
d) Les trois point d’exclamation courent jusqu’au bout de la ligne.

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