13 mai [1841], jeudi soir, 7 h.
Je suis si lasse, mon adoré, que je me dépêche à t’écrire pour être sûre de n’être pas forcée d’ajourner ce petit plaisir-là, car je sens qu’aussitôt que je l’aurai écrite je me coucherai tout de suite. Je ne peux plus maintenant supporter un peu de fatigue sans en ressentir de très vives douleurs dans le bas-ventre. Je suis forcée d’avouer mon dégommage à l’endroit des jambes et des autres membres de la même famille. Je crois que Mme Picardet [1] me rend des points, ce qui m’humilie furieusement. Néanmoins voici une bonne corvée de faite, il y a bien encore celle des rideaux mais ce n’est rien auprès de ce qui a été fait aujourd’hui. J’ajourne la tisane et les frictions à demain, je suis trop lasse pour m’amuser à ce genre d’exercice [2]. Demain il fera jour, comme disent les portiers, mais ce soir il fait nuit et j’ai besoin de mon lit.
Je vous aime mon Toto chéri, je vous adore mon cher petit Picardet, je vous trouve beau et adorablement bon et charmant. Voilà mon opinion, si elle vous blesse j’en suis fâchée, je ne peux rien y faire. En attendant ne venez pas trop tard ce soir, qu’il ne soit pas dit que vous ne pouvez venir chez moi que chaque fois qu’il y a impossibilité à moi de profiter de votre chère et tant désirée personne. Je vous attends Toto, venez vite mon petit Picardet.
Juliette
BnF, Mss, NAF 16345, f. 145-146
Transcription de Gwenaëlle Sifferlen assistée de Florence Naugrette