31 juillet 1867

Bruxelles, 31 juillet [18]67, mercredi, 8 h. du m[atin]

Bonjour, mon cher bien-aimé, bonjour, je t’aime. Sois heureux de tout le bonheur que tu répands autour de toi, sois aimé et sois béni par tous les tiens comme tu l’es par moi, je t’adore. C’est aujourd’hui que doit se décider le baromètre, à en croire le préjugé populaire, mais je ne vois pas jusqu’à présent que sa mine soit bien rassurante car il fait triste et froid ce matin. Quant à moi, je suis résolue à être heureuse partout où tu seras heureux et j’attends de cœur ferme tous les caprices météorologiques. Pourvu que je sente^a que tu m’aimes, je me fiche de Tout, est-ce clair ?
Ton vieux petit-fils a aujourd’hui quatre mois révolus. C’est un bel âge [1]. J’espère lui en faire mon compliment tantôt ainsi qu’à son auguste famille. J’emmènerai Suzanne avec moi et elle m’attendra quelques instants sur le boulevard où je la retrouverai en sortant de chez toi. Voilà le programme de ma sortie. Il n’est pas trop excentrique, n’est-ce pas ? À propos d’excentrique, il faut absolument que je me fasse faire six chemises peignoirs^b et autant de corps. Sans compter le châle de Suzanne à aller choisir. Il pourrait bien se faire que je profite de la matinée de demain s’il fait beau, à moins que cela ne te contrarie. Dans ce cas-là, je rengaine mon projet auquel je ne tiens pas autrement. Je t’aime. Voilà tout.

BnF, Mss, NAF 16388, f. 203
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette

a) « que je sentes ».
b) « six chemises peignoires ».