Paris, 24 juin 1882, samedi matin, 8 h.
Je me suis indulgée [1] ce matin, mon cher bien-aimé, en faisant la grasse matinée comme une paresseuse ; mais cela ne m’avance pas à grand-chose de bon car je suis toute grimaude [2] et toute mal en point en ce moment. Je m’en console en pensant à ta belle santé et à ton immuable sérénité qui font la sécurité et la joie de ma vie. J’ai fait mettre à la poste les deux lettres que tu m’as confiées hier et je te porterai celles qui sont arrivées, depuis, parmi lesquelles il y en a deux qui me sont adressées avec prière de te les communiquer, ce que je ferai dès que tu pourras les entendre. La première est de Manuel [3], qui est en tournée dans la Creuse, remplie d’enthousiasme et d’adoration. C’est vraiment un digne homme et un excellent cœur. La seconde de Blémont [4] à propos du vers, inédit, retrouvé et déjà tiré par l’éditeur pressé de faire paraître ton Livre d’Or. Il serait désolé qu’un retard nouveau s’ajoute à tous les autres et ils te supplient tous les deux l’auteur et l’éditeur de leur permettre de publier tout de suite. Séance publique au Sénat à deux heures et adoration perpétuelle de ta dévouée Juju.
[Adresse]
Monsieur Victor Hugo
BnF, Mss, NAF 16403, f. 119
Transcription d’Yves Debroise assisté de Florence Naugrette