Je suis une pauvre fille, et vous un méchant garçon. Vous m’avez trompéea en me promettant de venir me trouver aussitôt que vous auriez fini votre consultation – Il est évident que vous avez manqué à votre parole et que vous ne m’aimez pas comme je vous aime – Il est certain que vous n’êtes plus chez M. Duvergier et depuis longtemps – Qu’êtes-vous devenu depuis ce moment ? Qu’avez-vous fait ? À qui avez-vous pensé ? – Voilà ce qu’il faut que je sacheb, et que vous me direz, n’est-ce pas ? La vérité tout entièrec, rien que la vérité et puis, si vous n’êtes pas aussi coupable que vous le paraissez, je vous couvrirai de baisers, je vous adorerai, je vous mangerai, vous savez ? Si vous êtes décidément un perfide – je vous gronderai, je vous pardonnerai – je vous baiserai – je vous adorerai – je vous mangerai, comme si vous ne m’aviez pas fait de chagrin –
Tout ce long babillage signifie au fond que je t’aime – que je ne suis pas une minute sans penser à toi – et que quand je t’attends, je ne peux pas m’occuper à autre chose qu’à t’écrire tout ce qui me passe par le cœur. Je t’aime, je suis folle. Viens vite si tu ne veux pas que je sois triste et malheureuse.
Juliette
Mercredi, 10 h. du soir
[Adresse]
Pr mon bien-aimé
BnF, Mss, NAF 16322, f. 225-226
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette
a) « trompé ».
b) « saches ».
c) « toute entière ».