15 mars 1879

Paris, 15 mars [18]79, samedi matin, 10 h.

Cher bien-aimé, il fait un temps exquis et j’ai le cœur plein du plus tendre et du meilleur amour, c’est pourquoi je voudrais ne te dire que d’aimables et de douces choses. Mais le mal de tête me tient si fort que j’ai grand peur de ne te dire que de maussades bêtises. Enfin je me risque, comptant, comme toujours, sur ton inépuisable indulgence et ta patiente bonté. La giboulée de notes à payer s’est^a fait rudement sentir aujourd’hui sans compter^b celles qui se montrent à l’horizon plus nombreuses et plus grosses encore que celles de ce matin. Heureusement que je peux m’en laver les mains sans troubler mon eau. Demain il faudra t’entendre là-dessus avec ton cher Paul Meurice car lui seul est au courant^c de toutes les fournitures et de tous les travaux de TON déménagement et de ton installation. Puis, dès que tu le pourras, il faudra donner un coup d’œil aux achats nécessaires au ménage, proprement dit, et à celui qui regarde, non moins proprement, l’entretien personnel^d de nos deux corps… Quand je te le disais que je ne dirais que des bêtises ! Je finis par celle qui les résume toutes : je t’adore.

[Adresse :]
Monsieur Victor Hugo

BnF, Mss, NAF, 16400, f. 74
Transcription de Chantal Brière

a) « c’est ».
b) « compte ».
c) « courrant ».
d) « personnels ».