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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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8 mai 1837

8 mai [1837], lundi, midi ¼

Je veux vous payer ma dette touta entière mon cher adoré petit homme, et pour cela je vous donne mon cœur, mon âme en vous priant de les prendre s’il vous plaît. Hum, si j’osais je sais bien ce que je vous demanderais mais je n’ose pas et puis ce serait peine perdue. Ainsi je ravale ma proposition sans la mâcher. Quel beau temps mon petit chéri, quel beau temps, quel dommage que nous soyons si peu riches. Nous pourrions à l’heure qu’il est nous mettre en route et être si heureux. Je vous ennuie de vous dire toujours la même chose mon cher petit Toto, mais c’est qu’aussi je vous aime toujours autant. Ça fait que la monotonie s’en mêle. Si vous voulez que je varie dans mon langage, tâchez que je vous aime moins. Alors j’aurai beaucoup d’esprit et je serai très drôle. En attendant permettez-moi d’être comme je suis, c’est-à-dire une pauvre femme qui vous aime de toutes ses forces et qui voudrait vous voir depuis le matin jusqu’au soir et la nuit encore. Jour.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16330, f. 139-140
Transcription de Sylviane Robardey-Eppstein

a) « toute ».


8 mai [1837], lundi après-midi, 1 h. ¼

Il y a juste une heure que je vous ai écrit ma seconde petite lettre et dans cet intervalle mon cœur s’est empli de tout l’amour que j’avais vidé sur le papier. C’est donc à recommencer. Je vous aime mon cher petit homme plus que vous ne le saurez jamais car pour vous le prouver autant que cela est, les occasions me manqueront, dussé-jea vivre mille ans et plus. J’en suis donc réduite à vous dire en paroles ce que je sens avec le cœur. Je vous aime au-delà de tout. Je vous aime au-dessus de tout. Je vous aime enfin. J’aurais été bien joyeuse si vous aviez pu dîner avec moi aujourd’hui. Mais une si grande joie ne m’est pas donnée. Je me renfrogne donc dans mon humeur sombre en attendant qu’il vous plaise de venir l’éclaircir d’un de vos regards. J’ai vu Lanvin et Mme Guérard. Tous deux sont fort insignifiants pour ne pas dire plus. Il est plus que tempsb que tu viennes au secours de Lanvin. Car à moins de se couvrir d’une immense feuille de vigne, il ne lui est plus permis de se montrer sans enfreindre les ordonnances de police qui ordonnent à tous [les] Français quel quec soit leur âge, leur sexe et leur rang, de couvrir plus ou moins les dons que la nature a oublié de légaliser [1]. Et puis je vous aime comme il n’est pas possible.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16330, f. 141-142
Transcription de Sylviane Robardey-Eppstein

a) « dussai-je ».
b) « tant ».
c) « quelque ».

Notes

[1Par l’intermédiaire de Juliette, Hugo fera don de vêtements usagés aux Lanvin.

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