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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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4 novembre [1847], jeudi matin, 8 h.

Bonjour, mon Toto, bonjour, mon cher petit homme adoré, bonjour camp volant, bonjour, monsieur courta toujours bonjour je vous aime. Je me permettrai seulement de vous demander pourquoi vous ne restez pas plus longtemps la nuit puisque vous vous donnez la peine de venir ? C’est bien le moins que vous me donniez le temps d’en profiter, ce n’est pas queb si c’est pour me dire les infamies que vous me dites sur votre vieux pont [1], vous pouvez bien rester chez vous et ne jamais revenir. Tiens c’est vrai, je n’ai pas besoin d’être tourmentée à vif par un méchant homme comme vous. Je ne vais pas prendre chez vous les belles choses qui y sont, donc vous n’avez pas le droit de venir chez moi toucher à n’importe quoi sans ma permission. Ne l’oubliez pas désormais ou je vous fiche des calottes. Maintenant tâchez de venir tous les soirs un peu plus que pour me réveiller. Je ne trouve pas très drôle que vous n’arriviez juste que pour avoir le plaisir de me tirer de mon lit deux fois de suite en moins de cinq minutes. Je veux que vous me donniez le temps de vous reconnaître et de me réchauffer dans l’intervalle, et que vous me disiez un peu plus de trois méchancetés. Il ne faut pas toujours abuser de la bonté du pauvre monde. Ça n’est pas digne d’un grand homme comme vous. J’espère qu’en vous prenant par LES SENTIMENTS vous deviendrez plus traitable et plus prodigue de votre auguste personne. En attendant je vous aime dix cent mille.

Juliette

MVH, α 9008
Transcription de Nicole Savy

a) « courre ».
b) Phrase incohérente, sans doute par interruption.


4 novembre [1847], jeudi, 11 h. ½ du matin

J’irai te chercher tantôt, n’est-ce pas mon cher petit homme ? C’est là-dessus que je compte pour me rabibocher un peu de mes longues journées de silence et de mes longues nuits de rien du tout. Et puis, je verrai CELESTE ! Tout cela me rend le brouillard moins épais et le froid moins pénétrant. Fichtre on se réchaufferait à moins. Cependant il va falloir que je m’occupe sérieusement tout de suite d’un petit supplémenta de manteau doublé et ouatéb pour les jours où je n’aurai pas cette bouillante compensation. D’abord je ne peux pas m’en passer et je suis déjà en retard avec les traditions, les baromètres et ma propre peau qui se [bleuit  ?] et se racornitc malgré que j’en aie. S’il le faut j’emploierai pour cela l’argent que je destinais aux tapisseries. Tu me le rendras plus tard quand tu seras riche, c’est-à-dire bientôt. J’ai confiance en toi. En attendant je trouverais très stupide de souffrir du froid quand je peux faire autrement. Aujourd’hui, pas plus tard, si je suis prête de bonne heure j’emporterai tous mes brimborions pour les faire estimer. N’est-ce pas que j’aurai raison ? En attendant, je te baise un peu plus que partout et je t’adore.

Juliette

MVH, α 9009
Transcription de Nicole Savy

a) « suplément ».
b) « ouatté ».
c) « raccornit ».

Notes

[1Il peut s’agir du dessin du Vieux pont de Lucerne, de décembre 1839, auquel Juliette Drouet peut faire allusion aussi dans les lettres précédentes.

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