Université de Rouen
Cérédi - Centre d'étude et de recherche Editer-Interpréter
IRIHS - Institut de Rechercher Interdisciplinaire Homme Société
Université Paris-Sorbonne
CELLF
Obvil

Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

Accueil > Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo > 1848 > Mars > 15

15 mars 1848

15 mars [1848], mercredi matin, 8 h. ½

Bonjour, mon cher petit bien-aimé, bonjour, mon adoré petit Toto, bonjour. J’espère que tu seras revenu de cette hideuse corvée déjà depuis longtemps et que tu es occupé à te reposer et à te réchauffer. Je n’ai pas insisté hier pour m’offrir de la faire à ta place parce que je n’étais pas très bien portante et que j’aurais craint de ne pouvoir pas dormir de la nuit et de me rendre malade tout à fait ce qui serait une complication fâcheuse par le temps qui court. Je regrette que tu n’y aiesa pas pensé plus tôt parce que j’aurais pu t’épargner l’ennui de cette corvée en en chargeant ce bon M. Tissard qui n’aurait pas mieux demandé et qui se trouve justement dans le voisinage. Pourvu que cela ne t’enrhume pas davantage c’est tout ce que je demande. Du reste je suis toujours très inquiète de savoir comment je me tirerai à honneur de ce pas difficile. J’ai très peu de ressource par devers moi comme expédients et je me tourmente outre mesure des difficultés de ma position. Cependant je suis résolue à faire tous mes efforts pour te contenter seulement je crains de ne pas y parvenir. Et dans ce cas-là la bonne volonté ne pourrait pas être comptée comme pour le fait. Enfin qui vivra verra en somme, le bon Dieu se chargera peut-être de faire la balance de mes dépenses et au profit de tout le monde. Je t’aime et je te baise en attendant.

Juliette

MVH, 8052
Transcription d’Anne Kieffer assistée de Michèle Bertaux

a) « es ».


15 mars [1848], mercredi, midi ½

Je te croyais revenu chez toi depuis longtemps, mon pauvre petit homme, quand tu es venu baigner tes yeux [1] ce matin. Plus j’y pense et plus je trouve absurde que tu ne te sois pas épargné cette fatigue quand cela t’était si facile. Enfin la chose est faite ; il s’agit maintenant de ne pas la prolonger outre mesure. Tu me diras tout à l’heure ce qu’il faut que je fasse personnellement et je m’y conformerai avec empressement et avec plaisir. Ne pouvant prévoir tout cela j’avais écrita au fils de Mme Luthereau que je serai chez moi tous les jours de midi à 2 h. J’en serai quitte pour lui redonner une autre heure voilà tout. Maintenant il faut bien que je te parle encore dépense et argent. J’ai pris tout à l’heure 15 francs à Suzanne pour les deux reconnaissancesb à renouvelerc et pour la blanchisseuse. À l’heure qu’il y est je leur dois 55 francs, dans un mois ce sera le loyer 192 francs 16 sous, dans trois jours son mois 26 francs 10 sous. Tout ceci bien entendu ne peut être pris sur la seule somme de cent francs que le nouvel arrangementd met à ma disposition d’ici à un mois. Je suis une part pas plus contrariée de te parler de tout cela. Il m’en coûterait infiniment moins d’aller aux expédients avec le peu de nippes qui m’appartient en toute propriété. Ce n’est pas [par] fierté c’est plutôt par trop d’amour. Baise-moi et ne te fâche pas si je t’aime trop.

Juliette

MVH, 8053
Transcription d’Anne Kieffer assistée de Michèle Bertaux

a) « écris ».
b) « reconnaissance ».
c) « renouveller ».
d) « arrengement ».

Notes

[1Dans ses lettres, Juliette Drouet évoque à plusieurs reprises les problèmes ophtalmiques de Victor Hugo.

SPIP | | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0
(c) 2018 - www.juliettedrouet.org - CÉRÉdI (EA 3229) - Université de Rouen
Tous droits réservés.
Logo Union Europeenne