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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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2 juillet [1847], vendredi matin, 8 h. ½

Bonjour mon petit Toto aimé, bonjour, mon doux adoré, bonjour je t’aime et vous ? Je me dépêche de faire mes affaires pour être prête à 1 h. quand tu viendras me prendre pour te conduire. En te quittant je reviendrai chez moi et j’irai porter à ma pauvre fille deux admirables lys que j’ai dans mon jardin et que je lui destine depuis longtemps. Je serai revenue de bonne heure et même si tu pouvais me donner rendez-vous quelque part je pourrais aller te chercher. Être avec toi c’est un si grand bonheur, c’est le seul que je désire, je ferais tout au monde pour l’avoir ne fût-cea que quelques minutes. Hélas ! je vois bien qu’il me faut renoncer à l’espoir de faire un petit voyage cette année et les deux autres suivantes, après ce que tu m’as dit sur la nécessité de travailler sans relâche tout ce temps-là. Et cependant je suis bien résolue à ne pas te tourmenter et à avoir bien du courage et bien de la résignation. Je ne veux pas que mon ennuib de ne pas te voir s’ajoute à la fatigue de ton travail et je te promets d’être bien SAGE, quand je devrais en crever. Jour Toto, jour mon cher petit. La pauvre Juju est bien attrapéeb car elle comptait, sans en rien dire à personne, sur une petite excursion, bien loin, bien loin cette année même. Hélas ! hélas ! hélas ! et trois millions de fois hélas ! La pauvre Juju avait compté sans son cher petit AUTRE, ce qui la console médiocrement de sa déception. Baise-moi et aime-moi. J’en ai bien besoin.

Juliette

MVH, α 7930
Transcription de Nicole Savy

a) « fusse ».
b) « ennuie ».
c) « attrappée ».


2 juillet [1847], vendredi midi

Je serai prête à l’heure, mon Toto, c’est pour cela que je prends le temps de te gribouiller quelques bonnes tendresses d’ici là, afin d’avoir double bonheur. Si tu peux me donner rendez-vous tantôt pour aller te chercher je serai bien heureuse. D’ici là, je vais faire des vœux pour que ce soit.
Dites donc, Toto, j’ai fait mon travail de critique à votre nez et à votre barbe et vous n’en avez rien vu. Et j’ai fait des merveilles et vous ne les connaîtrez que par le cri général d’admiration qu’elles exciteront à leur apparition. Vous en mourreza de jalousie et j’en serai bien aise. C’est tout ce que je veux. Cela vous apprendra à vous moquer d’une FAIBLE FAUME beaucoup plus forte que vous en littérature. Je ne suis pas fâchée de l’occasion qui s’est présentée de constater publiquement ma supériorité sur vous et sur tous les AUTRES. Cette leçon pourra vous servir et vous donner un peu plus de modestie devant la plus belle moitié du genre humain. Sur ce baisez-moi sans rancune et aimez-moi de même. Je vous pardonne et je vous souris et je vous PORTE et je vous adore. Vous êtes mon Toto ravissant dont je ne fais qu’une bouchée.

Juliette

MVH, α 7931
Transcription de Nicole Savy

a) « mourerez ».

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