Université de Rouen
Cérédi - Centre d'étude et de recherche Editer-Interpréter
IRIHS - Institut de Rechercher Interdisciplinaire Homme Société
Université Paris-Sorbonne
CELLF
Obvil

Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

Accueil > Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo > 1873 > Novembre > 23

Paris, 23 novembre [18]73, dimanche matin, 8 h. ¾

Cher bien-aimé… Je crains d’ajouter un seul mot après celui-là, qui résume le fond et le tréfondsa de ma vie depuis plus de quarante ans. La prudence me conseille le laconisme ce matin et de ne pas fouiller trop avant dans mon cœur, de peur d’en faire sortir des tristesses coupables, peut-être, après toutes les marques d’adorable tendresse dont tu me combles en toute occasion. Aussi, mon ineffable grand bien-aimé, je voudrais qu’il fût convenu entre nous que mon gribouillis s’arrêtera court chaque fois qu’il y aura danger pour moi à prolonger mes épanchements. Je t’ai promis de ne plus t’importuner de mes terreurs et je tiendrai parole, j’en suis sûre, si tu me promets la fin et les moyens d’y arriver en me taisant chaque fois que je sentirai mon courage chanceler comme à présent. J’ai besoin de m’habituer peu à peu aux modifications inévitables que m’impose ma beaucoup trop longue vie. Mon parti en est honnêtement et sérieusement prisb mais cela ne suffit pas pour me faire une seconde nature du jour au lendemain. C’est pour arriver à ce résultat promis et accepté par moi que je te supplie, mon cher bien-aimé, de me permettre de censurer moi-même mes maussades restitus et de substituer beaucoup de points suspensifs à mes piteux rabâchages. C’est la seule coquetterie de mon pauvre vieux cœur, et j’y tiens.

BnF, Mss, NAF 16394, f. 327
Transcription de Manon Da Costa assistée de Florence Naugrette

a) « tréfond ».
b) « prit ».

SPIP | | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0
(c) 2018 - www.juliettedrouet.org - CÉRÉdI (EA 3229) - Université de Rouen
Tous droits réservés.
Logo Union Europeenne