31 août 1873

Paris, 31 août [18]73, dimanche matin, 8 h.

J’entends que tu marches ; bonjour, mon grand bien-aimé ; bonjour toute^a âme dehors, car je crois que tu as passé une très bonne nuit, ne t’ayant pas entendu remuer, si ce n’est une seule fois à quatre heures du matin. Quant à moi je suis dans la phase des mauvaises nuits, ce qui fait que je ne m’étonne ni ne me plains de la blancheur de celle-ci. J’attends avec patience que le tour des bonnes revienne^b. Que dis-tu de ce temps ? Il doit faire un beau soleil dans le bois de Vincennes en ce moment à en juger par la pluie qu’il fait ici. Aussi je m’attends à te voir décamper aussitôt après la dernière bouchée de ton déjeuner. Autrefois je n’aurais pas manqué cette partie de natation avec toi. Maintenant ma néphrite m’attache au rivage et j’en bisque affreusement ; tel^c est mon sort ; j’en connais de plus heureux.
J’ai essayé de t’obéir hier, mon cher petit homme, mais tous mes efforts n’ont abouti à rien qu’à me donner un horrible mal d’estomac qui dure encore. Cela étant, je te supplie de ne pas t’en fâcher et de trouver bon que je m’abstienne encore cette fois d’écrire à ta petite belle sœur [1]. Laisse-moi me livrer tout entière d’avance au bonheur de t’entendre lire ton nouveau chef-d’œuvre ce soir à Vacquerie et à Meurice. Je t’adore.

BnF, Mss, NAF 16394, f. 254
Transcription de Manon Da Costa assistée de Florence Naugrette

a) « tout ».
b) « reviennent ».
c) « telle ».