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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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13 juin 1838

13 juin [1838], mercredi matin, 11 h. ¼

Bonjour mon cher bien-aimé. L’omnibus ne t’a pas fait de mal hier au soir ? Je croyais que tu viendrais cette nuit te reposer auprès de moi. Je l’avais tant désiré que j’espérais que mon désir serait satisfait. Je ne veux pas pourtant, mon bien-aimé, qu’il y ait pour toi d’équivoque dans le mot désir que j’emploie naïvement car sans renoncer à ce qu’il contient d’intime et de doux, je veux que tu saches que la possession de ta personne adorée est aussi bien dans ta main serrée dans la mienne, dans ta belle tête reposant à côté de la mienne que dans toutes les caresses de la passion. Je ne fais pas la petite bouche mais je t’assure que la première des jouissances et le suprême bonheur, c’est de te savoir avec moi, auprès de moi. Et puis si je m’explique mal et si je mets beaucoup de cheveux dans ma sou… dans mon style, je vous prie de ne pas vous moquer de moi. Tout le monde n’a pas le moyen d’être un grand et sublime Toto comme vous. Quoi ! mon amour, pas même un pauvre petit voyage de huit jours ? Pas même quelques petites excursions dans la banlieue ? Toto, Toto, hélas ! vous dérogez, vous dérogez en oubliant nos bonnes traditions ! Vous dérogez en ne m’aimant plus d’amour, ce qui est très mauvais genre, MON CHER AMI. Moi je t’adore, moi je t’aime.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16334, f. 260-261
Transcription d’Armelle Baty assistée de Gérard Pouchain


13 juin [1838], mercredi soir, 5 h. ¼

Déjà reparti, mon adoré ! Et j’ai à peine eu le temps de baiser ta belle bouche et de respirer ton haleine qui m’enivre ! Déjà reparti et pour me faire perdre patience tu m’as dit en t’en allant ce mot hideux qui me désespère je travaille. Et vous voulez par-dessus le marché que je vous rende un des dessins que j’ai entre les griffes ? Oh ! Pour ça, non par exemple, n’y comptez pas à moins pourtant que vous n’ayez trop mal à vos pauvres yeux adorés car j’aime encore mieux me faire mal dans le cœur que d’ena faire à vos yeux bien-aimés qui sont mes deux soleils. Je laisse cela à votre conscience. En me reprenant un de vos chefs-d’œuvre, vous m’ôtez une de mes reliques, une de mes hosties consacrées, vous m’ôtez un souvenir d’amour, car tout ce que vous avez fait, tout ce que vous avez touché, me devient plus précieux que l’or et les diamants ne le sont pour les marchands et les avares. Cependant je te le répète, mon bien-aimé, plutôtb que de te faire mal aux yeux, je te redonnerai tout ce que tu voudras, avant tout ta santé, avant mon cœur, avant mon bonheur, tes yeux adorés. Je baise tes chers petits pieds sur la plante et ta belle bouche tout au fond.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16334, f. 262-263
Transcription d’Armelle Baty assistée de Gérard Pouchain
[Souchon, Massin]

a) « dans ».
b) « plus tôt »

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