Université de Rouen
Cérédi - Centre d'étude et de recherche Editer-Interpréter
IRIHS - Institut de Rechercher Interdisciplinaire Homme Société
Université Paris-Sorbonne
CELLF
Obvil

Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

Accueil > Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo > 1838 > Mai > 29

29 mai 1838

29 mai [1838], mardi matin, 8 h. ½

Bonjour mon petit homme chéri ! Vous voyez que je suis matinale. Je vais prendre un bain car depuis trois jours mon mal de reins a augmenté. J’espérais que vous tiendriez à essayer votre passe-partout cette nuit, il paraît que je me suis trompée, je vous en demande un million de pardons accompagné de plusieurs autres. J’ai rêvé de vous toute la nuit mon Toto. Ça méritait un autre sort que celui que vous m’avez fait en restant chez vous comme un ours blanc. Jour mon petit homme. Je voudrais que la mort funeste d’Harel me permît de verser de douces larmes sur sa mémoire. Malheureusement il a la vie dure et j’aurai je crois longtemps à lui souhaiter la peste, le choléra et la gangrène blanche de toutes les couleurs. Jour mon petit o. Jour mon gros to ! Si vous voulez me voir transformée en phoque tout à l’heure, vous n’avez qu’à venir, c’est le moment. Si vous ne venez pas tant pis pour vous et pour moi, c’est que vous êtes une bête plus bête que toutes les bêtes de la création puisqu’elles aiment leurs femelles.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16334, f. 204-205
Transcription d’Hélène Hôte assistée de Florence Naugrette


29 mai [1838], mardi soir, 5 h. ½

C’est mon jour d’expiation aujourd’hui n’est-ce pas mon Toto ? Il faut bien que les deux heures que tu m’as données hier se retrouvent aujourd’hui. Aussi je suis gaie comme le temps et si je ne pleure pas comme lui, c’est que je ne veux pas vous donner le prétexte de me gronder de vous aimer trop.
J’ai pris un bain ce matin qui ne m’a pas soulagée. Je souffre et j’engraisse tous les jours davantage. C’est la conséquence de l’aimable régime d’inaction et d’impatience auquel je suis soumise depuis plusieurs mois. Je voudrais être dispensée de t’écrire quand je suis dans mes humeurs noires : d’abord tu y gagnerais de ne pas lire mon gribouillage, premier bienfait dont tes yeux seraient reconnaissants. Ensuite je ne perdrais pas par des plaintes inutiles le peu d’amour que tu as peut-être encore pour moi. Malheureusement tu y mets une insistance plus galante qu’amoureuse qui me force bon gré mal gré à te donner quatre pages de mon écriture tous les jours mais je t’assure qu’il serait bon pour tous les deux que les jours où je souffre plus que de coutume de ton absence, tu me laissesa [bien  ?] pleurer et aimer en dedans.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16334, f. 206-207
Transcription d’Hélène Hôte assistée de Florence Naugrette

a) « laisse ».

SPIP | | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0
(c) 2018 - www.juliettedrouet.org - CÉRÉdI (EA 3229) - Université de Rouen
Tous droits réservés.
Logo Union Europeenne