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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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28 février 1838

28 février [1838], mercredi midi ½

Vous me trompez, vieux Toto, vous n’avez pas de répétition aujourd’hui. Je vous pardonne parce que vous êtes venu déjeuner avec moi et que j’espère que vous allez revenir très tôt voir ce que je fais. Ce que je fais, je peux vous le dire. Je ne grave pas la sentence au mur de Balthazar, je ne rends pas à César ce que je dois à César, je vous aime, voilà tout. Je vous aime dans ce moment-ci autant que je vous ai aimé depuis cinq ans. Je vous aime bien au-delà de mes forces, bien au-dessus de tout calcul humain. Je vous aime comme on doit aimer au ciel, si le ciel est habité par des âmes. J’ai bien quelque mérite car vous ne m’aimez pas le quart de ce que je vous aime et vous ne pensez à moi que lorsque vous me voyez, pas souvent… Enfin, je me contente de ce peu-là et j’espère à force d’amour et de tendresse augmenter le vôtre. Je t’écris ces quelques lignes dans un si effroyable mal de tête que je distingue à peine les mots que je gribouille. Je crois que j’aurais besoin d’être saignée ou purgée car j’ai tous les jours mal au cœur et à la tête. Et tous les jours aussi je t’aime davantage.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16333, f. 113-114
Transcription de Marie Rouat assistée de Gérard Pouchain


28 février [1838], mercredi soir, 6 h. ½

Avant de prendre mon bain, mon adoré, je vous écris votre petite lettre pour vous rappeler, si vous l’aviez oublié, que je vous aime de toute mon âme. J’ai eu la visite de Mme Guérard qui a déjeuné chez moi fort maigrement mais c’était de circonstance mercredi des cendres. Enfin, elle désire avoir beaucoup de places pour Marion, ce qui ne sera guère possible. J’ai vu aussi tantôt la mère Lanvin.

Mercredi soir, 11 h. ½

Je reprends ma lettre un peu tard. C’est qu’après avoir pris mon bain et pendant que je dînais j’ai eu la visite de Mme Lanvin et de son cousin qui croyaient fermement qu’on donnait la pièce demain [1]. Avant j’avais vu aussi la mère de Mme Guérard. J’ai aussi ma petite foule, moi. Je les ai tous remis à samedi. Ensuite j’ai arrêté tous mes comptes, et puis je t’écris et puis je pense à toi et puis je t’adore et puis tu es mon beau et bon Toto. Soir pa, soir man. Il paraît qu’il pleuvait fort il y a une heure puisque Mme Lanvin est remontée prendre mon parapluie ; tâchez de ne pas vous laisser mouiller et de venir très tôt. Je vous adore.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16333, f. 115-116
Transcription de Marie Rouat assistée de Gérard Pouchain

Notes

[1La reprise de Marion de Lorme à la Comédie-Française est plusieurs fois repoussée.

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