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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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18 juin 1848

18 juin [1848], dimanche matin, 8 h.

Bonjour, mon cher bien-aimé, bonjour, mon doux adoré, bonjour. Eh ! Bien, que dis-tu de mon effroyable migraine qui n’est pas encore passée à l’heure qu’il est et que je traîne depuis huit jours ? Quant à moi, j’en suis abrutie et tout à fait découragée. Rien ne peut donner l’idée de ce que je souffre et de la perturbationa que ce mal hideux cause dans toute ma vie. Il y a des moments, quand je ne suis pas stupide, où il me semble que je vais devenir folle furieuse. Hier, je m’étais promis une si grande joie d’assister à ton souper que j’avais achetéb moi-même et préparéc à moitié ; mais j’ai été vaincue dans la lutte et force a été de me coucher comme une pauvre bête. Ainsi, rien ne me réussit soit que j’aille te chercher, soit que je t’attende chez moi. Je suis aussi mal partagée d’un côté que de l’autre, grâce au guignon, aux affaires et à la migraine. Cela ne t’empêche pas d’être le plus doux et le meilleur des hommes et moi la plus maussade et la plus amoureuse des Juju.

Leeds, BC MS 19c, Drouet/1848/28
Transcription de Joëlle Roubine

a) « perturbartion ».
b) « acheter ».
c) « préparer ».


18 juin [1848], dimanche midi

Quand je pense que j’aurais pu passer une heure si heureuse auprès de toi cette nuit et que cette vilaine migraine m’en a empêchée, je suis inconsolable. Vraiment, je suis bien malheureuse. Je voudrais te le cacher, mais c’est plus fort que moi, il faut que mon pauvre cœur se dégonfle. Demain, j’irai à Saint-Mandé savoir à quelle heure Mr le curé dira la messe mercredi. Je ne sais pas si c’est l’approche de ce douloureux anniversaire qui me rend si souffrante, mais depuis huit jours je suis comme une folle [1]. Je ne crois pas pouvoir être de retour assez tôt pour t’attendre, et d’un autre côté tu ne sais pas à quelle heure tu sors de l’Assemblée, ce qui fera que je ne te verrai que le soir tard. Encore, si tu pouvais venir aujourd’hui de bonne heure, je serais si heureuse qu’il me semble que mon bonheur te ferait plaisir à voir. J’ai un si ardent besoin de te voir, mon adoré bien-aimé que j’en suis malade. Je t’aime trop.

Leeds, BC MS 19c, Drouet/1848/29
Transcription de Joëlle Roubine

Notes

[1Claire Pradier, fille de Juliette Drouet et du sculpteur James Pradier, est morte de la tuberculose le 21 juin 1846. Le curé de Saint-Mandé avait sa confiance.

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