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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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25 juillet [1844], jeudi soir, 5 h. ½

Je ne t’avais pas écrit le matin, mon Toto, parce que je me suis mise à nettoyera ma maison dès en me levant. Je suis obligée de prêcher d’exemple si je veux faire faire quelque chose à ma servarde [1] qui ait le sens commun. Cela ne m’a pas empêchée de penser à toi, bien au contraire : l’amour, c’est comme la soif, on ne l’oublie pas parce qu’on n’a pas bu. Je ne sais pas si cette comparaison est orthodoxe mais elle exprime pour moi ce que j’éprouve dans ces deux cas. Je ne veux pas, mon cher bien-aimé, que tu donnes la peine à ton petit Toto de chercher des vieilles lettres de six mois. Ce que je désire, ce n’est pas d’avoir le trop-plein de ton panier à vieux papier, je voulais tes lettres jour par jour comme tu avais l’habitude de me les apporter autrefois. Puisque cela ne se peut pas, n’en parlons plus, c’est plus simple. Mais, [et ?] pour ne jamais revenir sur une chose qui me fait de la peine parce qu’elle annonce que ton amour n’est plus ce qu’il était pour moi, je te dirai que, puisque tu trouves moyen de te faire donner tous les jours presque tous tes journaux, il ne te serait pas plus difficile, encore moins, de te faire donner tes lettres. D’ailleurs, il y a telle et telle de ces lettres à laquelle tu es obligé de répondre immédiatement et à laquelle tu réponds. Ainsi, il ne te serait pas possible d’attendre trois mois pour le faire [utilement ?]. Je n’insiste autant sur ce nouvel ordre de chosesb que parce qu’il m’afflige profondément et parce que je ne veux plus en parler jamais. Je comprends très bien qu’on monte six étages pour se tuer, mais je ne comprends pas qu’on frappe deux fois à une porte qui ne veut pas s’ouvrir. Avant toute chose, je veux éviter l’importunité. Je te supplie même de ne plus m’apporter les journaux. Je t’ai déjà dit que je n’avais pas la moindre curiosité de rien. Je te le prouve à tous les instants de ma vie, ainsi, tu peux me croire. Ce que je veux savoir, c’est si tu m’aimes et comment tu m’aimes.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16355, f. 297-298
Transcription de Mylène Attisme assistée de Florence Naugrette

a) « nétoyer ».
b) « chose ».

Notes

[1Suzanne.

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