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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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Paris, 10 décembre [18]77, lundi soir, 7 h. ½

Tu ne te doutes pas, mon pauvre bien-aimé, à quel degré d’agacement je suis arrivée depuis la rentrée du Sénat. Cette attente d’un grand malheur ou d’une grande délivrance qui basculent sans jamais s’arrêter et sans aboutir à rien est une des choses les plus énervantes qui soit et je crois que si cet état se prolonge encore quelques jours, j’en tomberai malade.
Je n’ai rien compris à ta non-sortie du Sénat ce soir quand il paraissait avéré qu’il n’y restait aucun sénateur [1]. Jules Simon, qui m’a mise en tramway et en wagon, m’assurait qu’il n’y avait plus personne dans la salle des séances, ce que j’avais constaté par moi-même. Enfin Lapommeraye, qui m’a donné le bras de la gare ici, paraissait également surpris de ton absence et l’attribuait à une visite de curiosité à la Chambre. Tout cela ajouté à la fatigue d’une séance bredouille, m’avait mis de la belle humeur où tu m’as trouvée tout à l’heure et dont je te demande pardon. J’espère que la journée de demain fera quelque heureuse diversion à ce statu quo démoralisant et odieux. En attendant, mon adoré, je ne veux pas te quitter d’une semelle et je t’accompagnerai demain corps, cœur et âme.

BnF, Mss, NAF 16398, f. 334
Transcription de Guy Rosa

Notes

[1L’avant-dernier paragraphe de la note de Hugo datée 10 décembre explique peut-être cette disparition :
« Tout à faire à la fois. Le temps m’a manqué pour les notes au jour le jour. J’ai donné le dimanche 8, au Grand-Hôtel, un dîner à la presse littéraire de tous les journaux. Il y avait cent quarante-huit convives. J’ai porté un toast à MM E. Perrin, Biéville et Banville m’ont répondu (voir les journaux). Sarah Bernhardt était à ma droite. Je suis rentré chez moi à minuit.
Pendant ce temps-là tout est sombre. Mac-Mahon continue d’être une calamité publique.
Il y a eu hier Sénat. Nous avons passé (les délégués des trois gauches du Sénat) tout le temps de la séance publique en comité secret. Plusieurs résolutions graves ont été abordées et débattues.

Aujourd’hui 10 décembre nous avons eu encore comité secret des délégués des gauches du Sénat. On ne sait s’il y a un ministère. Ils sont tous faits le matin et défaits le soir.
Sénat. Rien que de l’anxiété. Nous avons eu trois séances secrètes. » (ibid., p. 901)

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