Université de Rouen
Cérédi - Centre d'étude et de recherche Editer-Interpréter
IRIHS - Institut de Rechercher Interdisciplinaire Homme Société
Université Paris-Sorbonne
CELLF
Obvil

Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

Accueil > Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo > 1842 > Janvier > 3

3 janvier [1842], lundi matin, 11 h. ½

Bonjour le plus méchant des Toto, bonjour le plus SURPRENANT des hommes, bonjour vilain monstre. Baisez-moi. Je ne sais pas pourquoi vous vous permettez de ne plus m’aimer et de ne plus venir déjeuner avec moi comme c’est votre devoir, mais je sais que si vous continuez à me faire surprise sur surprise, je m’enverrai à tous les diables voir si j’y suis et que vous serez bien malin si vous me rattrapeza. Taisez-vous, je vous ficherai des coups si je vous tenais.
Je ne sais pas encore jusqu’où va le désastre de cette nuit, je viens de changer de chemise seulement et je verrai tout à l’heure quand je serai levée ce qu’il y aura à faire pour réparer toutes ces avaries. En attendant, Jacquot est charmant. Il parle, il crie, il appelle, que c’est une jubilation parmi MES GENS DE L’OFFICE ! Il est plus gentil que vous celui-là, et il n’a pas de [peine  ?]. La mère Lanvin viendra peut-être aujourd’hui mais j’ai économisé le poulet qui devait servir hier pour aujourd’hui, ainsi cela ne fera plus de dépenses. Cette année, je n’ai eu absolument que la mère Pierceau à dîner au jour de l’an et le lendemain, Joséphine même m’a fait faux bondb, je ne sais pas pourquoi, mais cela ne m’inquiète pas, attendu que je ne lui ai rien fait pour l’éloigner.
Dites donc, a-t-il crié quand il m’a mordu ? [1] Ah ça, vous savez que je ne vous écris pas sur du grand papier comme ça pour mon plaisir ni pour des prunes ? Mais parce que je vous dois et que je ne veux rien avoir à vous. Voilà le seul motif qui me porte à vous gribouiller ce susdit immense morceau de papier. QUELLE SURPRISE ! Je marche sur vos traces comme vous voyez. Et où pourrais-je d’ailleurs trouver un plus AIMABLE, un plus CHARMANT, un plus EXACT maître que vous ???????? Nulle part à coup sûr, aussi, je me borne, fontaine, à ne pas boire de ton eau à moins que tu n’y mettes du vin et que tu ne viennes DÉJEUNER avec moi sans COQ À L’ÂNE, mais avec un aimable poulet que je ferai rôtir tout exprès pour cette solennité. Comment va Dédé ? Comment vont les SURPRISES par là ? Pas aussi fort qu’ici je l’espère. Dans tous les cas, ce ne serait pas SURPRENANT, vous y participant. Baisez-moi, méchant homme. Pourquoi que vous n’êtes pas venu ce matin ? C’était bien la peine de compter et d’écrire mon linge d’avance si vous ne deviez pas venir me récompenser en venant cette nuit me RÉCHAUFFER. Décidément, vous n’êtes pas un fameux toto pour l’année 1842. Je ne sais pas si D’AUTRES (AU FÉMININ) ont meilleurs pronostics de vous que moi, mais ce que je sais c’est que je n’en donnerais pas un liard percé de vos CAPACITÉS physiquesc et morales. Cela ne m’empêche pas de vous aimer mais cela m’épêche.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16348, f. 9-10
Transcription d’Hélène Hôte assistée de Florence Naugrette

a) « rattrappez ».
b) « bon ».
c) « phisiques ».

Notes

[1À élucider.

SPIP | | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0
(c) 2018 - www.juliettedrouet.org - CÉRÉdI (EA 3229) - Université de Rouen
Tous droits réservés.
Logo Union Europeenne