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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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Guernesey, 9 janvier 1859, dimanche, 9 h. du m.

Cher adoré, je suis humiliée de t’aborder tous les matins avec le mot le plus banal de notre langue : Bonjour, bonjour, bonjour ; bonjour. De quelque façon que je l’accentue, aucun ne saurait te donner l’état de mon cœur, de ma pensée et de mon âme. Aussi, je me trouve bien absurde et bien ridicule d’enfourcher tous les matins ce mot à toute bride qui ne peut me mener jusqu’à toi ni à rien de ce que mon amour convoite et désire. Tous les jours je jure que ce sera la dernière fois que je me mettrai âne sur ce stupide mot, et tous les jours ma vieille niaiseriea monte à dada dessus. Mais aussi c’est votre faute, mon cher petit homme, pourquoi diable voulez-vous que je continue les exercices de ma jeunesse dans un âge où tous les manèges même les moins innocents ne sont plus permis ? Il y a des moments où je crois que c’est pour avoir le droit de m’aimer moins, c’est-à-dire pas du tout, que vous me demandez cette RESTITUS accusatrice, ou plutôt justificative. Mon Victor bien-aimé, est-ce que ce n’est pas assez que je t’aime par-dessus ma raison sans me forcer de te le dire jusqu’à la stupidité ? Penses-y et permets-moi de cesser ces gribouillis sans rime ni raison.

BnF, Mss, NAF 16380, f. 9
Transcription de Mélanie Leclère assistée de Florence Naugrette

a) « naiserie ».

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