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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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25 juin 1842

25 juin [1842], samedi matin, 10 h.

Bonjour mon Toto chéri, bonjour mon cher amour bien-aimé, bonjour mes petits amis. Comment avez-vous passé la nuit ? Tu m’avais tant promis de venir cette nuit s’il ne survenait rien de fâcheux à ce pauvre petit malade que, ne te voyant pas, je crains qu’il n’ait eu une autre crise. Je sais bien qu’il t’arrive presque toujours de me manquer de promesse, mais cette fois-ci, je ne sais pas pourquoi, j’y comptais plus qu’à l’ordinaire, ce qui rend mes craintes encore plus vives. Tu serais bien bon, mon adoré, s’il n’y a rien de fâcheux, de venir me rassurer et si tu es inquiet de venir encore prendre des bons baisers, des bonnes caresses et du bon amour dévoué tant que tu en voudras. Je me tiendrai prête ainsi que Claire dans le cas où tu pourrais venir nous chercher pour aller chez le dentiste car il n’y a en effet pas de temps à perdre ni pour elle ni pour moi.
J’espère, mon cher adoré, que ton fameux bain russe ne t’aura pas fait de mal et que ton poignet est moins sensible aujourd’hui. Cependant je te trouve imprudent d’avoir fait ce remède avant d’en avoir parlé au médecin. Je voudrais bien, mon pauvre ange, avoir de tes nouvelles avant le retour de la comète de Halley, et savoir au juste la forme et la pesanteur de ta lune qui ne doit pas peser à coup sûr soixante-quinze fois moins que ma terre ou que mes LLUNES, si tu l’aimes mieux. Enfin, mon pauvre Toto bien-aimé, prends et invente tous les besoins et tous les prétextes qui peuvent te ramener tout de suite auprès de moi. Moi je n’en ai qu’un pour te désirer sans cesse, mais il est fameux : Je t’aime.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16349, f. 177-178
Transcription d’Ophélie Marien assistée de Florence Naugrette


25 juin [1842], samedi soir, 6 h. ½

Merci mon cher adoré, merci de tout mon cœur. Tu es un pauvre ange de bonté et de galanterie. Tu as des perles pour dents et un diamant pour cœur. Tu es un ravissant petit homme accompli, merci, merci, mes deux monstres sont charmants.
Voici donc une fameuse corvée de passée, mais hélas, c’est grand dommage qu’elle ne soit pas définitivement faite et qu’on ait la perspective désagréable d’une autre très prochaine [illis.]. Mais enfin, et quelles qu’en soienta les suites, cela m’a donné le plaisir de sortir avec vous, ce qui ne m’arrive pas trop souvent, mon pauvre bien-aimé. Maintenant dépêchez-vous de guérir votre chère petite patte blanche et venez déjeuner cette nuit avec moi, cela vous guérira mieux que les houspilleries du garçon de bain, en supposant que cela ne vous soit pas tout à fait aussi agréable que le balai de bouleau, les arrosages à chaud et à froid et les meurtrissures d’un galoupia [1]. Essayez-en et vous verrez que vous ne vous en trouverez pas mal.
Je suis bien contente que mon cher petit garçon va de mieux en mieux, je l’en aime encore davantage si c’est possible et je serai bien contente le jour où la guérison sera complète. En attendant je prie le bon Dieu pour lui et pour toi, mon bon petit homme et je vous aime tous les deux de toute mon âme. Soigne-toi, mon pauvre amour, aime-moi et reviens bien vite auprès de ta vieille Juju qui t’adore.

BnF, Mss, NAF 16349, f. 179-180
Transcription d’Ophélie Marien assistée de Florence Naugrette

a) « quelqu’en soit ».

Notes

[1Galoupia ou galoupiat : individu grossier, vaurien (TLF).

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