Guernesey, 19 mai [18]70, jeudi matin, 6 h.
Bonjour, mon toujours de plus en plus adoré, bonjour et bonne nuit aussi, je l’espère. Je ne sais ce que t’apporteront les nouvelles d’aujourd’hui, tristesse ou joie, mais je suis sûre par exemple que la journée ne se passera pas sans que tu aies commis quelques bonnes actions. Hier c’était le pauvre diable Noircy [1] que tu tirais de prison pour le rendre à la liberté, au soleil, et au travail. Pour peu qu’il comprenne son véritable intérêt et l’honneur que tu lui as fait en le sauvant de la déportation, peut-être, ou tout au moins du travail forcé, il tâchera de reconnaître ton bienfait en redev[en]ant honnête homme. En attendant je constate avec joie que la chaleur s’affirme de jour en jour, ce qui doit te faire grand bien et te guérir tout à fait. Quant à moi je vais étrenner ma belle baignoire [2] tout à l’heure avec la pensée que cela me fera un si grand bien.
BnF, Mss, NAF 16391, f. 138
Transcription de Jean-Christophe Héricher assisté de Florence Naugrette