Université de Rouen
Cérédi - Centre d'étude et de recherche Editer-Interpréter
IRIHS - Institut de Rechercher Interdisciplinaire Homme Société
Université Paris-Sorbonne
CELLF
Obvil

Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

Accueil > Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo > 1865 > Novembre > 17

Guernesey, 17 novembre, 18[65], vendredi matin, 7 h. ¼

Bonjour, mon cher bien aimé, bonjour. Que ton amour soit avec moi et avec mon esprit, ainsi soit-il. Telle est ma prière, NOSTER QUOTIDIANUM [1] que je te gribouille ce matin au petit petit jour. À propos de prière, je crois que tu feras bien d’y regarder à deux fois avant de donner la préférence au protestantisme aveugle sur le catholicisme borgne. Car, dans cette course au clocher du bigotisme et de l’intolérance, c’est encore le protestantisme qui tient la corde. Je te dis bêtement une chose que je crois raisonnable, mais la question pour moi n’est pas d’avoir de l’esprit mais de t’épargner des ennuis si c’est possible. Ce besoin l’emporte en moi sur la répugnance profonde que j’ai à m’immiscerb en quoi que ce soit dans les affaires d’autrui. Il est vrai qu’ici l’autrui c’est toi, c’est-à-dire la vie de ma vie, le cœur de mon cœur et l’âme de mon âme. Voilà pourquoi je me permets de te dire mon avis sans aucune autre prétention que de te prouver mon amour. Cela dit, je vais aller voir si le signal [2] est arboré. Le temps est doux et mou ce matin et je doute que nous puissions sortir tantôt. À ce sujet, je te ferai remarquer que je dois une visite à Mme Corbin. Le délai convenu entre ces sortes d’échanges de politesses est plus que passé, aussi je crois que je ferai bien de saisir le premier moment de beau temps pour m’acquitter de cette corvée. Il faudra aussi que j’aille voir au moins une fois les dames de Putron et Marquand. En attendant, j’éprouve toutes sortes de bonheurs à t’aimer seule à seule dans mon joli coin, telc est mon goût si j’ose m’exprimer ainsi.

BnF, Mss, NAF 16386, f. 178
Transcription de Anne-Estelle Baco assistée de Florence Naugrette

b) « m’imiscer ».
c) « telle ».

Notes

[1Tiré de la prière en latin du « Notre Père ».

[2Voir Torchon radieux.

SPIP | | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0
(c) 2018 - www.juliettedrouet.org - CÉRÉdI (EA 3229) - Université de Rouen
Tous droits réservés.
Logo Union Europeenne