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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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9 décembre [1835], mercredi matin, 9 h.

Bonjour, mon Toto, bonjour, mon adoré, comment que ça va ce matin ? Vous n’êtes pas malade ? Vous n’êtes pas trop fatigué de tous vos travaux nocturnes, du moins je l’espère ? Aussi, je vous baise et je suis très heureuse et je vous attends avec confiance.
J’ai passé une assez bonne nuit, moi, ce qui ne m’empêche pas d’être toute malingre ce matin, ce que j’attribue au temps froid et à la pluie. C’est pour cela que je reste dans mon lit car de toute façon, si le clerc de Manière venait, je pourrais ne pas me lever ou ne me lever qu’un moment ce qui est toujours autant de gagner en bois.
Mon cher petit Toto chéri, savez-vous que je vous aime plus que tout au monde ? Plus que ma vie, le savez-vous ? Savez-vous que vous êtes le plus grand, le plus beau et le plus noble des hommes, le savez-vous ? Pour peu que cela continue, je ne saurai plus où mettre mon amour et mon admiration pour vous, mon cher bien-aimé. Il y a déjà longtemps que je reportea le trop-plein de mon cœur sur tout ce que vous aimez, sur tout ce qui vous sert, sur tout ce que vous regardez avec plaisir et sur tout ce qui vous touche. Maintenant je vais en remplir tout l’espace de la terre au ciel. Après cela, nous verrons à prendre d’autres succursales.
En attendant, je vous envoie une traînée de baisers qui ira faire explosion juste à l’endroit de votre bouche.

J.

BnF, Mss, NAF 16325, f. 197-198
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette

a) « je reportes ».


9 décembre [1835], mercredi soir, 8 h. ¼

Avez-vous dit assez de bêtises ce soir, hein ? En avez-vous assez fait des calembours, des calembredaines et des coq-à-l’âne, hein ? Suis-je assez humiliée dans la personne de votre esprit, hein ? Convenez-en ! Quel malheur d’aimer un être de votre sorte, un vrai barbouilleur de papier comme au tempsa de la Bastille, ni plus ni moins. Tandis que vous savez qu’elle n’existe plus, la pauvre Bastille, que dans l’échafaudage de la colonne de juillet, vous en abusezb pour dire tout ce qui vous passe par la tête de bête. C’est LÂCHE !
C’est d’autant plus lâche que vous savez que je ne vous en aime que plus et que je suis femme à me rouler à vos pieds, après comme avant, pour obtenir de vous une seule de ces bêtises que vous rabâchez avec tant de désinvolture (comme vous dites).
Je n’ai pas ajouté foi entière à votre promesse de revenir tréteaux pour le théâtre. Aussi ne me suis-je pas du tout habillée pour ne pas avoir l’air d’une désappointée. C’est bien assez d’être triste au fond du cœur de ce que vous ne venez jamais sans encore avoir l’air bête. Vous savez que je vous donne plus de baisers que vous n’avez de cheveux et plus d’amour que vous n’êtes GROS.

J.

BnF, Mss, NAF 16325, f. 199-200.
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette
[Massin]

a) « autant ».
b) « vous en abuser ».

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