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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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16 décembre [1840], mercredi après-midi, 1 h. ¾

Bonjour mon bien-aimé, mon cher petit homme bonjour. Tu n’es pas venu encore ce matin quoique je t’aie attendu et désiré de toutes mes forces mais j’espère que ce n’est ta faute, il va sans dire qu’il n’est pas l’heure que ma pendule que ma pendule marque ? Je suis levée depuis un bon bout de temps et j’ai été réveillée à neuf heures et demie par cette pauvre mère Lanvin qui venait renouvelera la reconnaissance du 16 de ce mois montant à 35 f. et me parler en même temps de la perplexité où son mari et elle se trouvaient pour cette place en question. Je te raconterai en détails la chose mais il est probable que les pauvres gens ne réussiront à rien de bon quoi qu’ils fassent. Comme elle était pressée de rentrer chez elle parce que son mari l’attendait pour rendre réponse à Anténor Joly, elle a dû renouvelera la reconnaissance en s’en allant mais elle ne me la rapportera que dans quelques jours le plus tôtb possible. Quel froid, mon amour, même auprès du feu on grelotte. Comment font les pauvres gens qui n’ont ni feu, ni [pain ?], ni asile ? D’y penser cela serre le cœur. Ma fontaine est gelée et je crains qu’elle ne casse. Mes pauvres fleurs jettent un vilain coton et cependant je serai fâchée qu’elles meurent parce qu’elles me viennent de toi. Je t’aime mon Toto, je t’aime mon petit homme chéri. Pense à m’apporter les deux exemplaires de Mme Krafft car tout le mérite de cadeaux pour ces braves gens sera dans l’opportunité de l’envoic et nous sommes déjà en retard.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16343, f. 239-240
Transcription de Chantal Brière

a) « renouveller ».
b) « plutôt ».
c) « envoie »


16 décembre [1840], mercredi soir, 10 h. ¾

Quand vous lirez cette lettre, mon Toto, vous penserez qu’il y a de par le monde une Juju veuve depuis cinq jours et qui ne demande pas mieux que de vous donner l’hospitalité dans son lit chaud et dans le foyer le plus incandescent que vous pourrez désirer soit que vous l’appeliez cœur, âme, amour ou autre à votre choix. Seulement je ne veux pas que vous restiez plus d’une minute chez vous après la lecture de ce gribouillis, le temps de prendre votre chapeau et de venir rue Saint-Anastase no 14. Vous entendez bien, ne me le faites pas répéter ou vous aurez affairea à mon grand couteau. Je vais écrire à Carcel [1] encore une fois mais je suis bien ennuyéeb de sa lampe. C’est vraiment de la filouterie et je voudrais que tu pussesc m’y mener pour lui dire un peu son fait. En attendant je me crève les yeux et je dépense un argent fou. C’est fort embêtant. J’ai été joliment généreuse tantôt envers Mlle Dédé, la petite scélérate ne m’en aura jamais la moindre obligation et c’est là ce qui double la grandeur de mon sacrifice. Mais pour elle et pour vous il n’y a rien dont je ne sois capable, c’est plus vrai que ça n’en a l’air. Tâchez toujours de revenir tout de suite auprès de moi. Je le veux, je l’exige.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16343, f. 241-242
Transcription de Chantal Brière

a) « à faire ».
b) « ennuiée ».
c) « pusse ».

Notes

[1L’horloger Bertrand Guillaume Carcel (1750-1812) est l’inventeur d’une lampe dans laquelle l’huile s’élève vers la mèche grâce à un mécanisme de rouages et d’un piston. Cette lampe qui porte son nom sera perfectionnée et commercialisée par ses successeurs.

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