19 septembre 1868

Bruxelles, 19 septembre 1868, samedi matin, 9 h.

Je serais bien contente, mon cher bien-aimé, si ton rhume était déjà en décroissance. Mais, connaissant les habitudes tenaces de ce vilain mal, j’ai grand peur, au contraire, qu’il ne fasse encore que croître et enlaidir et que tu n’aies pas bien dormi cette nuit. Si je me trompe, tant mieux, je ne demande que ça. Quant à moi, je suis toujours logée à peu près à la même enseigne, plutôt mieux que moins bien ; j’ai pris ma fameuse eau, assez insignifiante jusqu’à présent. Il commence à pleuvoter mais j’espère que cela ne durera pas et que nous pourrons essayer de faire quelques pas tantôt. Mais pourvu que je te voie et que je me sente vivre à tes côtés, le reste m’importe peu. Il se pourrait, si le temps se mettait décidément à la pluie, que cela fasse revenir le petit Georges plus tôt. Au reste, tu en auras bientôt le cœur net puisque, de toute façon, toute ta famille doit être rentrée chez elle le 27 de ce mois. Je suis curieuse de lire le n^o 17 de La Lanterne [1]. Peut-être pourras-tu me l’apporter aujourd’hui. On s’intéresse d’autant plus à cette publication à balle forcée qu’on connaît l’honnête homme vaillant et charmant qui en fait tous les frais. Je suis bien contente pour lui de ton adoption qui en a fait le frère de tes fils. C’est plus que de l’armer chevalier. Je t’adore.

BnF, Mss, NAF 16389, f. 260
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette