Paris, 6 juin 1881, lundi matin, midi
Cher bien-aimé, puisque nous avons passé tous les deux une bonne nuit, réjouissons-nous quand même et en dépit des caprices du baromètre et de l’approche du vieux Médard [1] qui se fait déjà sentir.
J’ai eu ce matin la curiosité de lire l’article de Talmeyr sur ton livre [2] et je le trouve très beau, parmi les plus beaux ; puis j’ai voulu savoir aussi la note que donnait Bergerat dans Le Voltaire et je l’ai trouvéea très bonne et faisant très bien sa partie dans le concert d’admiration et d’enthousiasme universel. C’est au reste ce que chacun de tes chefs-d’œuvre inspire généralement à tous les cerveaux bien faits, à tous les cœurs honnêtes et à toutes les âmes élevées. Même les mal venus et les méchants ne peuvent pas toujours se soustraire àb ta sublime influence. Sois béni, mon grand bien-aimé, autant que tu es aimé et adoré par moi. Je te souris.
Le bon Bazire m’a fait l’honneur de me prier d’assister à son mariage jeudi [3] et j’ai dû par politesse lui promettre d’y aller mais je compte sur toi pour lui dire que je ne peux pas marcher même pour monter l’escalier du Sénat. Nous inviterons les nouveaux époux dès que tu le voudras, voilà qui les satisfera plus que ma vieille personne.
En attendant je t’aime plus que si j’avais encore des pieds pour courir après toi.
[Adresse]
Monsieur Victor Hugo
BnF, Mss, NAF 16402, f. 123
Transcription de Caroline Lucas assistée de Florence Naugrette
a) « trouvé ».
b) « et ».