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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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Paris, 9 août [18]79, samedi matin, 8 h. ½

Quand je suis entrée dans ta chambre ce matin, mon doux adoré, tu dormais d’un sommeil calme et profond qui m’a fait plaisir à voir. C’est bien le moins que tu te récupèresa le matin de tes nuits presque toujours incomplètes et que tu te reposes de ton labeur sublime et surhumain. Hélas ! je vois avec tristesse les derniers préparatifs de voyage de ton cher groupe de là-haut [1], car par ce que je sens moi-même déjà, tu souffriras de l’absence de ces charmants êtres aimés [2]. Je regrette que tu te prives du bonheur de les suivre. Jamais tu ne retrouveras peut-être une meilleure occasion d’être avec tes enfants par monts et par vaux. Ta santé et ton cœur en auraient bénéficié et ton travail n’y aurait pas perdu par la suite. Enfin puisque tu en jugesb autrement je ne dois pas insister davantage.
Je te fais penser que tu as une nombreuse réunion politique chez toi tantôt et qu’il te faudra déjeuner plus tôt que d’habitude. Arsène Houssayec t’envoied un charmant sonnet. J’ai reçu pour les amnistiés [3] du comité de la Ciotat un mandat poste de 88 F. que je donnerai à Vacquerie ce soir.
Enfin, mon adoré, ce qui vaut mieux pour moi : je te souris et je te bénis.

[Adresse]
Monsieur Victor Hugo

BnF, Mss, NAF 16400, f. 195
Transcription d’Apolline Ponthieux assistée de Florence Naugrette

a) « récupère ».
b) « juge ».
c) « Arsène Houssayes ».
d) « t’envoye ».

Notes

[1Il s’agit de la famille Lockroy (Édouard Lockroy a épousé Alice Lehaene, veuve de Charles Hugo, en 1877) qui habite dans l’hôtel voisin de celui de Victor Hugo et Juliette Drouet, au 132 avenue d’Eylau.

[2Lockroy s’apprête à partir en Italie pour des raisons de santé. Le couple emmènera avec lui Jeanne et Georges, les deux petits-enfants de Victor Hugo, qui souffrira beaucoup de cette absence.

[3Il s’agit des amnistiés de la Commune, que Hugo mettra un point d’honneur à défendre à la fin de sa vie : il voit dans l’amnistie un exemple moral pour le peuple, et une action fondamentalement républicaine. Une première loi en faveur de l’amnistie des Communards a d’ailleurs été votée le 3 mars 1879 ; elle sera complétée par une nouvelle loi, le 11 juillet 1880. Cette thématique revient avec récurrence dans les lettres de Juliette.

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