Paris, 5 mai 1882, vendredi matin, 8 h.
Rebonjour, mon doux adoré, ne fût-cea que pour faire compensation à cette médiocre nuit. Je suis très contente que la bévue, calculée peut-être, d’une partie de la presse pointue, ait été éclaircie et rectifiée hier par l’imposante députation d’hommes sérieux et considérables qui représentent la démocratie laborieuse et honnête de la France. J’espère que tout se passera très bien au Banquet Grisel mercredi prochain [1]. Cependant, si tu le permets, je t’y conduirai, je t’y attendrai et je te ramèneraib. De cette façon je serai tout à fait tranquille et sans attirer l’attention de personne, cette fois, puisque la voiture sera sur la voie publique. J’espère que tu ne me refuseras pas cette grâce qui est, d’ailleurs, dans nos conventions et dans nos habitudes depuis bientôt cinquante ans. En attendant je vois venir la seconde représentation cinquantenaire, avec une ardente curiosité, du ROI S’AMUSE [2]. Dans ma joie anticipée je mets ma pensée et mes mots à l’envers comme dans la phrase ci-dessus. Mais je sais que tu ne regardesc pas de si près avec moi, ce qui me tranquillise. Je t’adore, voilà le fond de ma science.
[Adresse]
Monsieur Victor Hugo
BnF, Mss, NAF 16403, f. 74
Transcription d’Yves Debroise assisté de Florence Naugrette
a) « fusse ».
b) « rammènerai ».
c) « regarde ».