Université de Rouen
Cérédi - Centre d'étude et de recherche Editer-Interpréter
IRIHS - Institut de Rechercher Interdisciplinaire Homme Société
Université Paris-Sorbonne
CELLF
Obvil

Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

Accueil > Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo > 1879 > Mai > 28

28 mai 1879

Paris, 28 mai [18]79, mercredi matin, 6 h.

Je t’envoie mon bonjour patron-minette, non pour te réveiller, mon grand bien-aimé, mais pour bénir ton rêve s’il se tourne vers moi avec amour. J’ai peu et mal dormi ; voilà quelques jours que je suis agitée et mal avec moi-même, je t’expliquerai cela tantôt si j’ai le courage de rouvrir des blessures mal fermées. En attendant je prie Dieu de te donner à toi le sommeil doux et vivifiant dont tu as besoin pour achever ton œuvre sublime et voir tes deux adorables petits-enfants entrer dans la vie responsable et inaugurer dignement par leur propre mérite l’honneur qu’ils ont d’être sortis de toi. Je te dis mal ce que je sens si bien mais Dieu qui voit mon cœur sait combien il est ardent et sincère dans son amour pour toi. Je suis si émue en ce moment que ma main tremble à ne pas pouvoir tenir ma plume. La respiration me manque comme si j’allais mourir. Ce sont des spasmes qui rendent l’âme anxieuse comme si elle sentait se rompre l’amarre qui la lie au corps. Je n’ai pas peur de la mort qui délivre mais j’ai peur de la mort qui sépare. La mienne sera-t-elle une délivrance ou une séparation ? Toi seul le sait. Mon éternité maudite ou bénie dépend de toi. J’attends, je t’aime, je prie et j’adore.

[Adresse]
Monsieur Victor Hugo

BnF, Mss, NAF 16400, f. 134
Transcription de Chantal Brière
[Souchon]

SPIP | | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0
(c) 2018 - www.juliettedrouet.org - CÉRÉdI (EA 3229) - Université de Rouen
Tous droits réservés.
Logo Union Europeenne