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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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3 janvier [1845], vendredi midi

Bonjour, mon Toto adoré, bonjour, mon cher amour bien aimé, bonjour. Ne sois pas triste, ne souffre pas, je t’en prie, je t’en supplie. Pense à tous ceux dont tu es la joie et le bonheur, pense à moi dont tu es la vie.
Je t’ai vu partir cette nuit avec un sentiment plus triste et plus douloureux encore qu’à l’ordinaire. Cela tient à ce que je t’ai vu tout pâle et tout défait. Mon cher bien-aimé adoré, si ma prière peut avoir quelque influence sur toi, je te prie à mains jointes de ne pas aller aussi souvent chez M. V.....a [1] Je voudrais même ne pas t’en parler autant et d’un autre côté, j’ai besoin de te prier de te ménager. Dans ce moment-ci, surtout, où tu as un travail forcé, obligatoire d’ici à quinze jours [2]. Tu dois comprendre mon inquiétude, mon Victor bien aimé, et me pardonner mes recommandations et mes prières.
J’ai dit ce matin à Claire toutes les sages et bonnes raisons que tu m’as dites hier. Elle s’y est rendue tout de suite. Elle est trop heureuse de suivre en tout tes conseils. Tu as mille fois raison. Tu as raison toujours, toi. Aussi j’écrirai dans ce sens à Mme Luthereau et je pense que le parrain ne le trouvera pas mauvais. En attendant, je t’aime, je te baise et je t’adore.

J.

BnF, Mss, NAF 16358, f. 9-10
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette

a) Cinq points suivent la lettre « V. ».


3 janvier [1845], vendredi soir, 4 h. ¾

Tu tiens trop ta promesse, mon bien-aimé, quand il s’agit de ne pas venir. J’aimerais beaucoup que ton inexactitude accoutumée se fît sentir dans ce cas-ci que dans les cas contrairesa. Je sais que tu m’as avertie, mon cher adoré, mais cela ne m’avance à rien sinon de savoir avec certitude que je ne te verrai presque pas d’ici à quinze jours [3]. C’est une médiocre consolation et je ne sais pas si je n’aimerais pas mieux l’ignorance qui me laisserait l’espoir de passer tous les jours 24 heures avec toi. Enfin, mon cher bien-aimé, je m’arrange le plus possible pour avoir du courage, de la patience et de la résignation. Si je n’y réussis pas, ce n’est pas de ma faute. Peut-être cela me serait-il plus facile si je n’étais pas tourmentée à ton sujet. Je ne peux pas être assez sûre de ta santé et de la providence pour ne pas craindre un accident ou un malaise. Tu devrais tâcher pour me rendre le courage plus facile, de venir un peu tous les joursb me montrer ta ravissante petite figure et me dire comment tu vas. De cette façon, je supporterais avec plus de force l’ennui de ne pas te voir. Il faut que je te voie pour pouvoir me passer de te voir. Ceci n’est pas si absurde que ça en a l’air au premier aspect et je m’entends très bien. Baise-moi, mon Victor bien aimé, aime-moi et viens bien vite me donner de tes chères petites nouvelles.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16358, f. 10-11
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette

a) « contraire ».
b) « les jour ».

Notes

[1Vraisemblablement Villemain. Suite à la découverte d’une maladie mentale, il démissionne du ministère de l’Instruction publique le 30 décembre 1844.

[2Le 16 janvier 1845, Victor Hugo prononce un discours à l’Académie française en réponse au discours de réception de Saint-Marc Girardin. Il y travaille depuis le 4 janvier, date inscrite à côté du titre du discours.

[3Victor Hugo est occupé à l’écriture de son discours qu’il prononcera le 16 janvier 1845 à l’Académie française en réponse au discours de réception de Saint-Marc Girardin.

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