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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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24 mai 1848

24 mai [1848], mercredi matin, 8 h.

Vous savez, mon cher petit homme, que votre apparition d’hier ne compte pas. Aussi il me faudra un fameux rabibochage aujourd’hui si vous voulez que je ne sois pas très hargneuse et très méchante. Déjà pour commencer j’ai oublié de vous dire bonjour, préoccupée que j’étais de vous dire tout de suite des sottises. Je crois que le carabinier de Charles et le général Hugo [1] sont du même régiment. Peut-être y ferez-vous bien d’y incorporer le gros Abel pour que cela vous soit plus commode quand vous me les faites passer en revue. En attendant les commissions vertueuses et républicaines suffisent pour occuper votre temps, assez pour qu’il ne vous en reste pas une minute pour moi. Voime, voime, vous êtes fort adroit mais c’est grand dommage que vos ficelles soient usées jusqu’à la corde et qu’il soita dangereux d’y suspendre des carabiniers des généraux, voire même des frères du calibre du vôtre. Si vous voulez, nous en fabriqueronsb d’autres, ficelles, à nous deux. En attendant je me fiche de vous et je vous tire la langue, c’est bien fait.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16366, f. 195-196
Transcription d’Anne Kieffer assistée de Florence Naugrette

a) « qu’ils soient ».
b) « fabriqueront ».


24 mai [1848], mercredi après-midi, 2 h.

Que faites-vous mon Toto, à qui souriez-vous et à qui pensez-vous dans ce moment-ci ? Je voudrais le savoir au risque de voir l’ombre de mon nez s’allonger indéfiniment et prendre des proportions d’obélisque. Je ne me suis pas habillée pour sortir parce que je pense que vous ne m’emmèneriez pas. Je vais profiter de mon séjour forcé pour travailler à mes chemises de flanelle. De votre côté, mon petit homme, vous devriez travailler à ma culotte, de manière à pouvoir me la livrer très prochainement. Si vous voulez que je vous aide, je ne demande pas mieux, vous n’avez qu’à parler. Vous voyez que je me mets à votre disposition de toutes les manières. Ne me laissez donc pas languir dans une stérile et énervante impatience. Je vous en prie, je vous en supplie. En attendant je t’aime, mon doux adoré, et je fais mille projets plus charmants les uns que les autres. Quand se réaliseront-ils ? Dieu le sait, c’est avec ces projets que je me fais des espérances de bonheur qui me donnent le courage de supporter le présent et de ne pas trop regretter le passé.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16366, f. 197-198
Transcription d’Anne Kieffer assistée de Florence Naugrette

Notes

[1Le général Léopold Hugo est le père de Victor Hugo. Cette allusion reste à élucider.

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