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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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3 janvier [1848], lundi matin, 8 h. ¾

Bonjour, mon Toto, bonjour, ma joie, ma vie, mon bonheur, mon âme. Je ne veux pas que tu donnes rien à copier chez toi. Je me suis mise en tête de copier à moi seule toutes ces sublimes douleurs et je voudrais réaliser mon projet. Cependant si cela te contrarie, je n’insiste pas car avant tout je ne veux pas te contrarier pour quoi que ce soit. C’est bien le moins, mon pauvre adoré, que je t’épargne tous les ennuis qui sont en mon pouvoir, et si cela en est un pour toi j’y renonce tout de suite. Ainsi je ferai ce que tu voudras. C’est un exemple que je voudrais vous voir suivre envers moi surtout quand vous voulez sortir et passer malgré moi à travers d’affreux ivrognes en fureur qui peuvent vous chercher querelle. Malheureusement vous n’avez pas pour mes volontés la même déférence que j’ai pour les vôtres. Je ne m’en plains pas mais j’en enrage souvent. Taisez-vous ça n’est pas vrai et je ne vous écoute pas. D’ailleurs vous êtes beaucoup trop loin, je ne vous entends pas. Si vous voulez que je vous écoute il faut venir jusqu’ici. Pauvre bien-aimé, quel quea soit le désir que j’ai de te voir, je ne veux pas que tu viennes d’aussi bonne heure si cela doit te faire lever plus tôt. Repose-toi, mon doux adoré, dors bien tranquillement et bien chaudement. Lève-toi le plus tard que tu pourras et viens dès que tu seras levé. Tu trouveras une maison touteb prête à te recevoir et une Juju bien heureuse de te voir. En attendant, elle se fait de la patience en pensant à toi et du bonheur en te le gribouillant tant bien que mal. Je t’aime mon petit homme, je t’adore mon Toto. Je te baise en gros et en détails plusieurs millions de fois.

Juliette

MVH, 8032
Transcription d’Anne Kieffer assistée de Michèle Bertaux

a) « quelque ».
b) « tout ».


3 janvier [1848], lundi, midi ½

Je n’ai rien à te dire que tu ne saches aussi bien que moi, mon amour, et cependant mon cœur est si plein que j’éprouve le besoin de le soulager en l’épanchant dans des mots sans suite et sans raison. Il me semble qu’à force de te répéter que je t’aime mon cœur reprend de nouvelles forces pour t’aimer davantage. Ce n’est qu’une illusion mais elle est si douce que je ne voudrais pas y renoncer pour rien au monde.
J’espère que tu vas venir tout à l’heure et je me dépêche dans cette pensée de faire toutes mes petites affaires.
Mme Luthereau m’avait priée de te demander un conseil sur le projet qu’elle a de venir à Paris pour vendre une quantité de livres imprimés que la maison a laissésa en paiement à son mari [1]. Mais tu es si occupé que je n’ai pas encore pu t’en dire un mot. Cependant je voudrais bien donner une réponse promptement et je désirerais avoir ton avis. Quant à son fils et à moi nous n’approuvons pas, jusqu’à présent, ce projet. Mais toi seul peut dire avec connaissance de cause si elle doit renoncer à cette ressource qui nous paraît à nous chimérique et plutôt onéreuse. Enfin si tu as un petit moment tantôt je te lirai le paragraphe qui te concerne et tu me diras ce que je dois lui répondre à ce sujet.
Mon pauvre bien-aimé, je voudrais t’épargner tous les petits surcroits de fatigue mais cette pauvre femme est si malheureuse et tu es si bon que je me risque encore une fois à t’importuner. Je t’aime de toute mon âme.

Juliette

MVH, 8033
Transcription d’Anne Kieffer assistée de Michèle Bertaux

a) « laissé ».

Notes

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