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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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17 mars 1843

17 mars [1843], vendredi matin, 11 h. ½

Bonjour mon cher petit bien-aimé, bonjour le bien-aimé de mon âme, comment vas-tu mon pauvre adoré ? Tu n’es plus triste n’est-ce pas mon Toto chéri ? Je te dis moi que ta chère petite bonne femme n’aura pas de chagrin et que ce désastre de la Guadeloupe ne pèsera pas sur elle [1]. Tu sais bien que je suis une vieille sorcière, que je te dis toujours ce qui doit arriver à tous ceux que tu aimes. Je te dis encore que nous serons les plus forts ce soir et que tous les siffleurs s’en iront comme des péteux avec un pied de nez de carton. Ne sois pas triste, mon adoré, je t’en prie, je t’en prie, mon bien-aimé.
J’ai la mère Lanvin qui vient chercher les billets. Je vais la prévenir de redoubler d’action et de vigilance et tout ira bien ce soir. Je serai bien tranquille quand cette ignoble cabale sera passée et bien heureuse si cela n’a pas fait de tort à la recette, ce qui n’est pas impossible surtouta avec cette affreuse épreuve de la Guadeloupe ; ces pauvres Burgraves auront eu tous les malheurs possibles, ce qui ne les empêchent pas d’être toujours les plus grandes et les plus sublimes des Burgraves.
Mais nous, mon adoré, quand serons-nous les plus heureux des amoureux ? Il y a bien longtemps que je soupire après ce moment-là. En attendant je vis seule et triste comme un pauvre chien. Il me semble pourtant que ce moment-là ne peut pas être éloigné puisque ta pièce ne peut pas tarder à paraître. Je t’assure, mon Toto, que nous avons bien besoin de bonheur tous les deux. Il faut absolument que tu viennes déjeuner avec moi demain. Tu n’as pas de répétition et tes épreuves doivent être corrigées à présent. Ainsi, mon Toto, si vous m’aimez vous viendrez avec emportement. J’ai rêvé de vous toute la nuit. Si vous croyez que ça m’amuse, vous vous trompez beaucoup. Je vous le dis sans détour et sans fard. D’ici là, je vous baise et je vous désire comme je vous aime.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16351, f. 239-240
Transcription de Olivia Paploray assistée de Florence Naugrette

a) « sur tout ».

Notes

[1Après leur mariage, Léopoldine et Charles Vacquerie se sont installés au Havre pour les affaires de ce dernier. Or, le tremblement de terre qui a ravagé Pointe-à-Pitre le 8 février est une mauvaise nouvelle pour le négoce du Havre où l’on travaille beaucoup avec la Guadeloupe.

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