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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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21 juillet [1847], mercredi matin, 8 h. ¼

Bonjour, mon doux Toto, bonjour, mon cher petit bien-aimé, bonjour, mon adoré, bonjour je t’aime et je te souris. Je reconnais que j’ai été stupidement méchante hier et que tu as été mille fois bon et adorablement indulgent et patient. J’assume tous mes torts passés et même ceux à venir car il n’est que trop probable qu’ils se renouvelleront encore plus d’une fois. Cette aimable prévoyance ne t’allèche que médiocrement mais je dois à la vérité, et à la connaissance que j’ai de mon caractère et de mon amour, d’en convenir franchement. Le jour où je t’aimerai moins il me sera très facile d’être bonne et charmante. Le tout est d’en arriver là mais j’ai grand peur de m’être trompée de route. Pour le moment je poursuis mon chemin à bride abattue dans le sens contraire, au risque de t’aimer trop et d’être encore dix mille fois plus méchante. Maintenant, Toto, baisez-moi et pardonnez-moi car c’est par ma faute, c’est par ma faute, c’est par ma très grande faute. C’est pourquoi je vous supplie de ne pas me garder rancune et de ne pas me prendre en grippe et en horreur. Ainsi soit-il.
N’oublie pas ma culotte, mon cher petit homme, la grande chaleur étant passée ce vêtement me devient de plus en plus indispensable [1]. C’est plus qu’un plaisir c’est un besoin et tu serais cruel de me le faire attendre plus longtemps.

Juliette

MVH, α 7940
Transcription de Nicole Savy


21 juillet [1847], mercredi après-midi, 3 h.

Je ne suis pas encore prête, mon petit Toto, ce qui fait que je n’irai pas chez Louise [2] tout à l’heure ; ce sera pour un autre jour où j’aurai plus de temps devant moi. Je suis contrariée que Joséphine ne soit pas venue à temps pour te porter ton tapis. Du reste cela ne m’étonne pas par l’habitude que j’ai d’être malencontreuse dans tout ce que je désire et dans tout ce que je fais. J’espère pourtant qu’elle viendra ce soir à moins qu’elle ne soit malade. Dans tous les cas j’enverrai savoir ce qui la retient chez elle, car elle n’est pas venue non plus dimanche.
Cher petit homme, mon Toto bien-aimé, je t’aime à deux genoux trois cœurs. Je voudrais te faire de bonnes surprises toute la journée. Malheureusement tes moyens ne me le permettent pas. C’est dommage car je m’y entendraisa assez bien. À la place de ces gracieusetés, je ne peux t’offrir que mon amour qui n’est rien moins qu’aimable trop souvent et qui, dans tous les cas, ne peut pas faire l’office de surprise. Enfin chacun donne QU’EST-CE QU’IL A. Moi je te donne mon cœur.

Juliette

MVH, α 7941
Transcription de Nicole Savy

a) « enttendrais », semble-t-il corrigé par-dessus « attendrais ».

Notes

[1Exemple d’humour de Juliette, qui termine cette lettre-Confiteor par un jeu de mots presque leste : elle rabat le sens figuré de « culotte » sur son sens ordinaire, le festin sur la lingerie.

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