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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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16 février [1839], samedi après-midi, 1 h. ¾

Bonjour, mon petit homme adoré, bonjour comment vas-tu ? As-tu passé une bonne nuit et tes pauvres beaux yeux sont-ils moins malades ce matin ? Je voudrais te savoir bien portant et heureux pour me réjouir sans aucune pensée triste de l’anniversaire de notre amour. Car c’est ce soir qu’il y aura six ans que nous nous aimons ! Six ans ! C’est bien long pour la jeunesse et la beauté d’une femme, mais pour l’âme en extase, ce n’est pas même un moment. Il me semble, mon adoré, que c’est ce soir seulement et pour la première fois que je t’attends et si tu viens, l’illusion sera complètea. Je croirai que le ciel s’ouvre pour moi. Je t’aime, je t’aime, je t’aime. Te souviens-tu quand et comment je te l’ai dit ? Eh bien, c’est avec le même sourire et avec le même enivrement que je te le dis encore à présent. Je viens de relire tous mes chers petits anniversaires. Il reste une page blanche que le 17 février [1839] et le 26 rempliront, n’est-ce pas, mon adoré ? Je t’aime, j’aurais voulu ne te parler absolument que de notre amour dans cette pauvre petite lettre mais voilà que la bonne me dit que l’homme du médecin est revenu ce matin pendant que je dormais. Je ne comprends pas cette insistance de la part de M. Vidal à m’envoyer des hommes ici. Au reste, la bonne lui a dit de venir ce soir s’il voulait. En attendant, je vais faire ta chère petite tisane et t’aimer de toute mon âme.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16337, f. 163-164
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Florence Naugrette

a) « complette ».


16 février [1839], samedi soir, 7 h. ½

J’espère, mon cher bijou, que ton absence de toute la journée tournera au profit de ce soir et de cette nuit. Sans cela, ce serait doublement triste pour moi ? Je t’ai attendu en vain toute la journée et il ne me paraît pas que tu viennes auparavant ton dîner ou si peu que le regret n’en sera que plus vif. Je suis triste, triste. Il est probable que tu auras donné ton temps à quelque commission ou à quelque importun plus heureux que moi ? Car c’est ainsi tous les jours. C’est moi qui aime et qui attends et ce sont les indifférentsa et les curieux qui profitent de votre adorable petite personne.
J’ai donné tantôt les 40 francs du médecin à son agent puisqu’agent il y a qui m’a remis en échange un double du mémoire et des acomptes, plus un reçu des 40 francs d’aujourd’hui. J’ai vu Gérard, la marchande de modes à qui j’ai commandé mes coiffures. J’ai fait ta chère petite tisaneb, nous verrons si tu la trouvesc meilleure. Cependant je crois que demain ce sera encore mieux. Je t’aime, je t’aime, j’ai le cœur triste en pensant que tu n’es pas venu de la journée et surtout aujourd’hui enfin.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16337, f. 165-166
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Florence Naugrette
[Pouchain]

a) « indifférens ».
b) « tisanne ».
c) « trouve ».

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