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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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Guernesey, 9 mars 1857, lundi après-midi, 2 h.

Voyez comme vous ABÎMEZ mon papier, vilain sale que vous êtes ; comment voulez-vous que je vous fasse une Restitus un peu PROPRE dans un pareil gâchis d’encre et de pâtés ! Le moyen d’épurer son style dans ce hideux margouillis. Ce sera donc sans amour PROPRE, je le répète, que je vous flanquerai mon cœur à la tête. Cher adoré, je profite d’un petit temps d’arrêt de ma névralgie pour te sourire à travers ce stupide badinage. Depuis huit jours je n’avais pas assez de mes deux mains pour me moucher, c’est ce qui fait que la pauvre restitus a été délaissée à mon cœur défendant. Aujourd’hui que je suis moins marécageuse, j’en profite pour mettre mon âme à ton SOLEIL. C’est si bon de s’épanouir le cœur et l’âme devant toi que j’en saisis toutes les occasions même quand cela doit faire pousser et fleurir toute la luxuriante végétation de ma stupidité. Je suis si heureuse de laisser chanter, s’ébattre et sauter de pataquès en pataquès tous les baisers et toutes les tendresses enfermées dans mon âme que ma foi, je n’y regarde pas de si près et que je me dis que je n’ai pas le droit d’être plus difficile que toi.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16378, f. 44
Transcription de Cindy Justin assistée de Florence Naugrette

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