Université de Rouen
Cérédi - Centre d'étude et de recherche Editer-Interpréter
IRIHS - Institut de Rechercher Interdisciplinaire Homme Société
Université Paris-Sorbonne
CELLF
Obvil

Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

Accueil > Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo > 1836 > Mai > 30

30 mai 1836

30 mai [1836], lundi matin, 10 h. ½

Bonjour, mon Toto bien-aimé, bonjour mon petit homme chéri. Vous n’êtes pas venu cette nuit ni ce matin. Sans doute vous travaillez, mon cher adoré. Aussi, je ne vous en veux pas du tout, je vous aime de toutes mes forces et je vous attends avec amour et courage. Le temps a l’air bien beau aujourd’hui. Tant mieux pour tes chers petits yeux et toute ton adorée petite personne.
Je ne sais pas comment je m’arrange mais j’ai presque continuellement mal à la tête, ce qui me gêne beaucoup et me rend encore plus stupide que je ne le serais sans cela. Je vais tâcher de finir aujourd’hui l’affaire papier. Tu devrais bien me permettre de brûler tous ceux que je ne garde pas, rien que pour nous désencombrer un peu.
Mon Dieu, mon cher petit Toto, que nous ferions bien de partir dès à présent. Il fait un temps ravissant pour le voyage, pas trop chaud, pas trop de soleil, nous serions au mieux. Si tu pouvais arranger tes affaires pour cela, ce serait une bonne combinaison que de partir de suite. Je te dis cela, ma chère âme, un peu pour la raison ci-dessus, beaucoup pour le bonheur qu’il vaut mieux tenir qu’espérer.
Je t’aime, mon Toto, tout se rapporte à mon amour et vient de mon cœur.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16327, f. 104-105
Transcription d’Isabelle Korda assistée de Florence Naugrette


30 mai [1836], lundi soir, 7 h.

Mon cher bien-aimé, tu m’as fait espérera que j’aurais peut-être le bonheur de dîner avec toi ce soir. Je veux, dans ce bien heureux cas, que tu aies ton contingent de pattes de mouches à la sauce d’amour la plus corsée qui se puisse faire dans un bon petit cœur tout à son Toto.
Je vous ai eu des filets de sole, des côtelettes de mouton, des petits poisb et du bouillon froid. Vous voyez, mon cher bijou, que vous pouvez vous confier à la fortune du pot. Mais à vous parler franchement, je n’ose pas me livrer à la joie de vous avoir pour convive ce soir. Vous paraissiez trop préoccupéc en me quittant. Votre génie apparaissait dans vos beaux yeux comme le soleil couchant à travers les ogives de Notre Dame la belle et que vous avez faited la grande.
Comme je vous le disais, mon bien-aimé, je n’ose pas croire que tant d’heur me soit réservé que de prendre ma nourriture avec vous.
J’ai lu l’article de Méry. C’est bien la critique de la critique la plus vraie et la plus spirituelle qu’on aite faitef depuis longtemps [1]. Je n’avais pas besoin de l’article de Méry pour sentir à quel point je t’aime et comment je t’admire, mais c’est une clé qui ouvre admirablement la porte où sont renfermés les trésors d’amour et d’adoration de toutes sortes qu’on porte en soi.
Je t’aime à genoux et prosternée. Je t’aime, je t’aime, je t’aime.

J.

BnF, Mss, NAF 16327, f. 106-107
Transcription d’Isabelle Korda assistée de Florence Naugrette

a) « espéré ».
b) « poids ».
c) « préocupé ».
d) « fait ».
e) « ai ».
f) « fait ».

Notes

[1À élucider.

SPIP | | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0
(c) 2018 - www.juliettedrouet.org - CÉRÉdI (EA 3229) - Université de Rouen
Tous droits réservés.
Logo Union Europeenne