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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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Guernesey, 4 janvier [18]73, samedi, 9 h. du m[atin]

Bonjour, mon cher grand bien-aimé ; Bonjour, comment ta nuit ? Si j’en crois l’heure de ton lever, elle n’a pas été bien bonne. Et pourtant tu avais toutes sortes de raisons pour bien dormir puisque tu avais reçu d’adorables gribouillis de tes deux petits, petits enfants Petit Georges et Petite Jeanne. Je crois que la lettre de Vacquerie t’inquiète plus que de raison sur ton cher petit Victor [1] et que ce qu’il prend pour un état maladif n’est que la suite d’une convalescence prudemment prolongée. J’espère, je suis sûre même, dans mon cœur, qu’Émile Allix te rassurera complètement sur cette chère santé en t’en rendant compte par le détail la prochaine fois qu’il t’écrira. D’ici là, il ne faut pas te tourmenter, il faut au contraire être heureux des charmantes étrennes épistolaires que t’ont envoyé tes ravissants petits enfants et m’aimer moi qui t’adore. Sans reproche, Môsieu, j’étais de faction bien avant le canon mais je ne m’en plains pas puisque je vous ai vu, tellement Vu ramasser mon gribouillis que vous aviez laissé tomber à vos pieds où il aurait dû rester si j’avais été maîtresse de son sort à ce moment là. Au même instant passait la Broisine, Claudo pede, on sait son auteur [2], à laquelle j’ai dit que je n’avais pas ce matin de déjeuner pour vous. Au même instant, aussi, la pluie recommençait avec furie car il parait que c’est un parti pris de la part du bon Dieu de nous inonder tous les jours comme c’est le mien de t’adorer à perpétuité dans cette vie, et éternellement dans l’autre.

BnF, Mss, NAF 16394, f. 3
Transcription de Maggy Lecomte assistée de Florence Naugrette

Notes

[1François-Victor Hugo mourra en décembre.

[2Citation d’Horace : « Pede poena claudo » (Odes, III, 2) qui signifie : « Le châtiment suit le crime en boitant ». Cette idée de la vengeance est souvent réinvestie dans les œuvres de Hugo. C’est par exemple le cas dans Hernani : « La vengeance est boiteuse, elle vient à pas lents, / Mais elle vient. » (II, 3).

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