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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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18 avril [1836], lundi matin, 9 h. ½

Bonjour mon Toto bien aimé, bonjour. Conviens que j’ai été bien maussade et bien absurde hier au soir avec mon mal de tête. J’étais bien malade, je t’assure, et je le suis encore un peu ce matin. Je souffre de la tête à ne pas y voir clair. Mais je t’aime d’autant plus. Je t’aime quoi qu’il arrive. Tous les incidents bons ou mauvais, tristes ou gais, ne servent qu’à te faire aimer davantage.
J’ai rêvé de toi toute la nuit. Je me suis disputée avec une grande dame que je ne connais pas à ton sujet. Tout Hernani, tout Angelo y ont passé. Je savais tout à la lettre par cœur. S’il m’était permis de jouer sur ce mot, je te dirais que ce n’est que comme cela que je te sais d’un bout à l’autre : par cœur.
Je viens de me rappeler que j’avais oublié d’écrire à Mme Guérard aujourd’hui au soir. Comme il serait peut-être préjudiciable à ce pauvre diable de soldat qu’on ne retardât d’un jour ou d’une heure les démarches à faire pour lui, je m’en vais écrire et envoyer la lettre sans t’attendre.
Tu es bon, toi, je t’aime. Tu ne te contentes pas d’être le plus beau, le plus grand et le plus admirable homme de ton temps, tu es bon. Aussi, je t’aime. Je te respecte ; je t’admire et je t’adore. Tu es mon Toto bien aimé, tu es mon grand Victor. Tu es mon Dieu.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16326, f. 318-319
Transcription d’André Maget assisté de Guy Rosa


18 avril [1836], lundi soir, 8 h. ¼

Mon cher petit homme bien aimé, voici l’heure de Lucrèce bien arrivée et vous n’arrivez pas. Qu’ena résultera-t-il ? c’est que je serai mouzon quand vous viendrez parce que j’aurais bien désiré voir la fameuse pièce de notre GRAND POÈTE. Je vous conseille d’avoir un para-claques ce soir ; car toutes celles que j’aurais données sur les joues de Mlle George retomberont sur les vôtres. Vous vous êtes joliment conduit dans les rues aujourd’hui. Aussi, la première fois que je sortirai avec vous, j’aurai soin de vous faire prendre des lunettes doublées de taffetas vert. Je serai sûre au moins que vous ne les verrez pas blanches les susdites cocottes qui se promènent au grand air. On sonne chez moi en ce moment, sans doute l’homme de tantôt. Non, c’est Mlle Rose. Je vais finir ma lettre après quoi je saurai ce qu’ilb en est. Je dis donc que je vous aime parce que vous êtes un scélérat, un Don Juan par delà de la Porte-Saint-Martin, un aimable monstre qu’il faut bien adorer puisqu’on ne peut pas faire autrement que d’aimer cette figure-là, que d’adorer ce grand Toto-là et tout le reste que je ne dis pas et qui est bien le meilleur.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16326, f. 320-321
Transcription d’André Maget assisté de Guy Rosa

a) « Quand ».
b) « qui ».

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