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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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Jersey, 28 décembre 1854, jeudi après midi, 2 h.

Cher adoré, j’espérais, avec l’aide copire, me déshabituer petit à petit de l’absurde manie Restitus mais j’avais compté sans mon autre Juju, laquelle en a tellement pris le pli qu’elle ne peut plus s’en passer. Aussi depuis quatre jours [1] elle est comme un cœur sans âme, ce qui n’est pas très amusant pour moi-même. Je frémis pour vous, mon tout adoré, de l’avalanche de stupidité, de tendresse, d’ineptie, de baisers, de sottise et d’amour qui va vous crever sur la bosse. Tendez vos poches, vos pieds, vos mains, votre bouche, votre cœur, votre âme et le reste pour y loger tout ça, si vous pouvez. Et puis encore, et surtout, tâchez de ne pas vous laisser geler de froid dans votre chambre sans feu. Sérieusement, mon pauvre petit homme, tu as tort de travailler toute une journée dans une chambre non chauffée, tu devrais venir ici où personne ne te dérangerait et où tu serais à l’abri de l’humidité et des maux de tête. Hélas ! il est infiniment probable que tu ne tiendras aucun compte de mes recommandations et de mes offres et que tu continuerasa à te rhumatiser dans ton coin comme toujours. En attendant je jette tout le feu de mon cœur et toute la flamme de mon âme sur tes chers petits pieds pour les réchauffer. C’est aujourd’hui jour de poste ce qui te retiendra peut-être bien tard chez toi. En t’attendant je vais copire ce que tu m’as donné hier. Du reste je n’ai pas revu les Préveraudb mais comme il faut ourler les mouchoirs avant de broder le chiffre il n’y a pas de temps perdu. Je crains seulement que tes petits [dessins ? desseins ?] ne soient pas compris par une personne habituée aux [desseins ?] précis de broderie. Enfin nous en aurons le cœur net bientôt. L’intention n’en restera pas moins gracieuse et charmante de toute façon, voilà ce qui est sûr. Ce qui l’est plus encore c’est que je vous aime par-dessus les étoiles et que je vous baise depuis A jusqu’à Z.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16375, f. 440-441
Transcription de Chantal Brière

a) « continuera ».
b) « Préverault ».

Notes

[1La dernière lettre date en effet du 24 décembre.

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