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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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6 juin 1854

Jersey, 6 juin 1854, mardi matin, 8 h.

Bonjour, mon cher petit homme, bonjour, je vous pardonne. Je n’aurais pas mieux demandé que de dîner avec toi chez Asplet [1] car là où tu es mon bonheur est ; mais, outre l’embarras d’accepter une invitation imposée par la circonstance à ces braves gens, il y avait la crainte de m’y rencontrer avec tes fils qui vont et viennent dans cette maison en toute liberté. Mon amour pour toi est tellement à vif que je redoute tout ce qui peut le blesser même involontairement et puis je te le répète, mon adoré, parce que c’est la vérité, j’ai fait plus de plaisir à Asplet en refusant son invitation que si je l’avais acceptée. Telle est ma conviction même devant les maisons et le portrait du père Collet.

9 h.

Je reprends mon gribouillis derrière vos talons, mon cher petit blagueur, au risque de ressembler aux toutous qui aboient à distance bravement. Prenez garde de vous faire des ennemies en regardant aux fenêtres des maisons et surtout prenez garde aux griffes des Jujus qui n’ont pas cent francs et qui n’entendent pas la plaisanterie.
Je ne vous demande pas à sortir aujourd’hui quoique j’en aie le droit mais la poste est un prétexte suffisant pour vous faire me refuser, sans compter qu’il fait presque beau et que vous aurez demain l’empêchement Téléki, après-demain l’empêchement Asplet. Dieu pourvoira aux empêchements suivants à défaut de votre travail. Tout cela ne m’empêche pas de vous aimer comme une bête que je suis. J’espère que vous allez bientôt revenir manger votre côtelettea, en attendant je vais préparer votre eau et puis tantôt j’enverrai des circulaires à Bruxelles et à Paris, seulement tu m’en as laissé trop peu, deux ce n’est pas suffisant. Enfin je les enverrai en attendant que tu m’en rapportes d’autres, mon petit Toto, je t’aime. Voilà ce que je te dis depuis un bout de ce gribouillis jusqu’à l’autre.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16375, f. 217-218
Transcription de Chantal Brière

a) « côtellette ».

Notes

[1Hugo fréquente les frères Philippe Asplet et Charles Asplet. Le premier lui rend de nombreux services.

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