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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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3 septembre [1846], jeudi matin, 7 h. ½

Bonjour mon pauvre cher bien-aimé, bonjour, comment va ton fils [1] ? Comment s’est passéea la nuit et comment vas-tu toi-même, mon pauvre adoré ? J’espère que le moyen que tu as pris hier au soir a complètement réussi et que ton pauvre Charlot se sera calmé de plus en plus. Je vis dans cet espoir et j’attends que Joséphine vienne me confirmer dans cette douce persuasion. Cher adoré, je suis impuissante à te consoler et à t’encourager parce qu’à force de t’aimer, les paroles me manquent. Cependant j’ai dans le cœur des tendresses ineffables et suprêmes qui te feraient oublier, ou plutôt qui adouciraient ton chagrin si je pouvais, si je savais te les dire. J’attends tantôt avec une douloureuse impatience, tous les jours c’est ainsi depuis que ce pauvre enfant est malade. J’ai un mal de tête sourd et vague qui me rend stupide. Il m’est impossible d’assembler deux idées sur quoi que ce soit qui n’est pas toi. Tu dois t’en apercevoir à la divagation de mes gribouillis. J’espère au reste que tu ne les lis pas, occupé que tu es auprès de ton cher enfant. Je te les écris parce que c’est un besoin de mon cœur et que tant que je ne l’ai pas fait, il me semble que tu es encore plus loin de moi et plus absent de ma maison. Aussi je n’y manquerais pas pour rien au monde et quel que soit l’état de ma pauvre tête. Mon Victor, je t’aime.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16364, f. 97-98
Transcription de Gwenaëlle Sifferlen assistée de Florence Naugrette

a) « passé ».


3 septembre [1846], jeudi soir, 8 h. ½

J’ai le cœur moins serré et moins tourmenté depuis que je sais que ton cher enfant va un peu mieux, mon pauvre petit bien-aimé. J’espère que ce petit mieux aura fait des progrès pendant ton absence et que tu m’apporteras ce soir l’heureuse nouvelle d’un mieux plus décisif et plus rassurant encore. Je l’espère et je le désire de tout mon cœur.
Cher adoré, tu as oublié ta montre, je ne m’en suis aperçue qu’à la lumière ; j’espère que cela sera un motif de plus pour que tu viennes ce soir. Pauvre cher adoré, je ne veux pas blasphémer ni être ingrate, même pour rire, car j’ai le cœur plein de la plus vive et de la plus douce reconnaissance pour tous les instants que tu me donnes malgré les trop justes et les trop tristes motifs qui pourraient t’empêcher de venir tous les jours. C’est à genoux que je t’en remercie, mon bien-aimé, comme à l’être le plus doux, le plus grand et le meilleur qui ait jamais existé. Je t’attends avec toutes les bénédictions sur les lèvres et dans le cœur, je te baise de l’âme et je te désire de toutes mes forces. Tu es mon Victor toujours plus aimé et plus adoré.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16364, f. 99-100
Transcription de Gwenaëlle Sifferlen assistée de Florence Naugrette

Notes

[1Charles Hugo a la fièvre typhoïde.

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