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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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27 juin 1847

27 juin [1847], dimanche matin, 9 h.

Je devrais ne pas t’écrire dans le moment où j’ai les yeux pleins de larmes et le cœur plein d’amertume car tout ce que je te dirai ne servira qu’à te rendre ton indifférence plus motivée et plus facile, mais le besoin d’épancher mon chagrin m’entraîne malgré moi à te parler de ce que tu sais aussi bien que moi car tu n’ignores pas combien je t’aime et par conséquent combien je te désire et avec quelle douloureuse impatience je t’attends toujours. Cette nuit, après les deux premières heures de sommeil, il m’a été impossible de refermer les yeux. J’écoutais tous les bruits extérieurs dans l’espoir de découvrir parmi eux celui que tu fais en ouvrant mes portes. Cette attention fatigantea pour le corps et irritante pour l’âme a duré jusqu’à quatre heures du matin. Je m’étais assurée dans l’intervalle du temps qu’il faisait pour être plus sûre de savoir à quoi m’en tenir sur le motif qui t’empêchait de venir me voir avant de rentrer chez toi, puisque tu es forcé de passer au bout de ma rue. Cette curiosité m’a conduite à pleurer jusqu’à présent.

Juliette

Leeds, BC MS 19c Drouet/1847/41
Transcription de Gwenaëlle Sifferlen

a) « fatiguante ».


27 juin [1841], dimanche, 2 h. ½

Je t’ai vu, mon doux bien-aimé, et cela m’a suffi pour être heureuse. Un mot de toi, ton sourire si doux et si persuasif substituent la joie et le bonheur à l’inquiétude et au chagrin. Tantôt j’étais on ne peut pas plus triste avant de t’avoir vu. J’avais comme un fer rouge dans le cœur, maintenant il me semble que j’y ai un rayon de soleil. Tout me semble un sujet de confiance et de tranquillité. Si j’avais su hier que tu n’étais pas allé seul à cette soirée, je n’aurais pas compté sur toi et je ne me serais pas tant tourmentée. Tout cela est oublié. Je ne me souviens plus que de ta noble et ravissante figure. Je n’ai plus de noir dans le cœur, je n’y ai que des rayons, et pourvu que tu viennes tout à l’heure, je ne désirerai plus rien. Mon Victor, je t’aime, mon Victor, tu es ma joie, ma vie, mon âme.
Tâche de venir bien vite afin que je fasse une grande provision de bonheur pour jusqu’à demain puisque je ne dois pas te revoir d’ici là une fois que tu seras sorti de chez moi tantôt. Je te baise en attendant autant de fois qu’il y a de secondes et que je t’aime, et je recommencerai quand tu seras là.

Juliette

Leeds, BC MS 19c Drouet/1847/42
Transcription de Gwenaëlle Sifferlen

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