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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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13 novembre [1845], jeudi matin, 11 h. ¼

Par quel temps tu es venu, mon petit bien-aimé adoré ! Il n’y a que toi pour sortir par des déluges comme aujourd’hui. Heureusement que tu étais bien couvert et que tu avais tes bonnes BAUTTES. Merci mon adoré, merci d’être venu. Si peu que je te voisa, cela suffit pour me donner de la joie pour toute la journée. Je parlais de toi quand tu es venu. Je disais combien tu es bon, doux, simple et ravissant. Je pensais tout haut comme cela m’arrive presque toujours quand je ne suis pas seule. Il faut bien que je m’épanche et puisque je ne peux pas te voir assez souvent pour te dire tout ce que j’ai dans le cœur d’amour et d’adoration, je le dis à qui veut l’entendre autour de moi. Cela ne peut pas te fâcher, n’est-ce pas mon Victor chéri ? Et cela n’a pas d’autre inconvénient que de te faire adorer par tous ceux qui m’entourent. Si cela vous contrarie, j’en suis fâchée mais cela m’est égal.
Vous ne m’avez pas encore apportéb le livre aujourd’hui. Vous voyez comme vous êtes oublieux, j’allais dire ennuyeuxc, mais je me suis retenue à temps pour ne pas vous manquer de respect. Mâtin de sien, vous n’êtes pas un bourzeois, vous faisez quéque sose, vous êtes pas RI et je ne veux pas me fiche de vous. N’est-ce pas que j’ai raison ? Baise-moi, porte-moi, souris-moi, je le veux tout de suite.
Mon Victor, j’ai le cœur plein d’amour. Je voudrais le verser dans ta vie pour la rendre la plus heureuse possible. Je t’adore.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16361, f. 149-150
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette

a) « je te voie ».
b) « apporter ».
c) « ennuieux ».


13 novembre [1845], jeudi soir, 6 h. ½

Tu as oublié d’emporter ta lettre à M. Vitet, mon doux bien-aimé, mais comme je pense qu’il ne sera pas trop tard ce soir pour la mettre à la poste quand tu t’en iras, c’est pour cela que je ne l’envoie pas porter tout de suite par Eulalie.
Cher adoré, encore une bonne action, tu n’en fais pas d’autre depuis un bout de l’année jusqu’à l’autre. À quelque heure du jour et de la nuit qu’on t’implore, on est sûr de te trouver. Les bons comme les méchants ont part à ta bonté inépuisable. Tu ressembles au bon Dieu en tout : par la beauté, par le génie, par le pardon et par la bonté. Je t’aime, je t’admire, je te vénère et je t’adore. Tout mon être se fait âme pour t’aimer. Mon Dieu, que je dis mal ce que je sens si bien et que c’est bête tout ce que je te gribouille là auprès de ce que j’ai dans le cœur de beau, de grand, de sublime et d’ineffable. Chaque fois que je t’écris, je sens mon amour rougir de ma stupidité. Bien souvent je m’arrête avec la résolution de ne jamais essayera à t’écrire, et puis le besoin que j’ai de te dire que je t’aime l’emporte sur mon amour propre et je grifouille de plus belle tout ce qui me vient du cœur, au hasard et comme je peux, en pensant que tu ne tiens pas à mon STYLE, AU CONTRAIRE. Pourvu que je t’aime, que tu sois mon amant, mon roi et mon Dieu, tu me pardonnes de ne pas savoir l’orthographe et d’écrire avec une plume de mon aile.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16361, f. 151-152
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette

a) « ne jamais essayé ».

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