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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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30 octobre [1845], jeudi matin, 8 h. ¾

Bonjour, mon petit bien-aimé, bonjour, mon Victor chéri, bonjour, toi, comment allez-vous ? J’ai si froid que je ne peux pas tenir ma plume. Cependant il fait bien beau temps, cela tient à la chambre. Même en été, cette chambre, qui est au midi, est horriblement fraîche. Cela tient peut-être au rez-de-chaussée. Quand j’aurai MA MAISON des Metz, je m’arrangerai de manière à avoir toujours chaud. Hélas ! je ne me figure que je puisse jamais être PROPRIÉTAIRE de quoi que ce soit. Je n’ai pas arrangé ma vie pour cela, aussi je n’y compte pas [1]. D’ailleurs il me faudrait avoir ma fille auprès de moi, ce qui n’est pas possible dans tous les cas. Cela n’empêche pas de faire des projets, AU CONTRAIRE, et de se dire plusieurs fois par jour : – QUI SAIT L’HASARD ?
Jour, Toto, jour, mon cher petit o. Il me semble que tu m’as permis d’aller voir ma fille ? Cependant je n’irai pas que je ne t’aie revu pour savoir si tu le veux et convenir de l’heure de l’allera et celle du retour. Je compte écrire tantôt à Mme Luthereau et à Brest. Et la COPIE ? Il faut convenir que je suis une vieille flâneuse et une vieille paresseuse. [illis.] ça n’est pas de vous tous ces petits gribouillis que je copie, je n’y ai aucun INTÉRÊT, si ce n’est de vous rendre service dans un temps donné. C’est quelque chose, j’en conviens, mais ce n’est pas autant que de copier en lisant les admirables choses que vous écrivez. Et puis battez-moi si vous voulez, je ne vous aimeraia que plus.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16361, f. 99-100
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette

a) « l’allée ».
b) « je ne vous aimerez ».


30 octobre [1845], jeudi soir, 5 h. ¾

Je suis revenue à cinq heures précises à ma pendule, mon cher petit bien-aimé, mais je suis partie un peu plus tard de chez moi parce que les cacaotiers [2] sont venus à 1 h. et que j’ai voulu surveiller leur ouvrage jusqu’à la fin. De plus, la pendule de la salle à manger s’était arrêtée sur 2 h. moins 20 minutes, ce qui m’a trompée et ce qui est cause que je ne suis sortie de la maison qu’à 2 h. ½ passées. Je suis restée moins de temps avec Claire afin de ne pas revenir plus tard que je ne te l’avais promis. Je n’ai fait qu’entrevoir Mme Marre mais je suppose que si elle avait eu quelque chose de nouveau à me dire de ma fille, elle m’aurait parlé.
Cher adoré bien-aimé, j’ai eu beau regarder de tous mes yeux pour voir si tu venais au-devant de moi, je n’ai rien vu. Tu as été sans doute à l’Académie aujourd’hui ? Ou, ce qui est plus vraisemblable encore, tu seras sortia avec toutes ces dames ? Enfin, que ce soit une raison ou l’autre, je ne t’ai pas vu, voilà ce qui n’est que trop sûr. Je vous ai trouvé bien beau ce matin. Cela m’a mis martel en tête. Il faudra que je vous surveille de près. Vous voici prévenu, prenez garde à vous. En attendant, vous devriez bien venir, car j’ai encore plus faim et plus soif de vous que de mon dîner, quoique j’aie une faim et une soif d’enragée. Pourquoi ne venez-vous pas, méchant homme ? Qu’est-ce qui vous retient à cette heure-ci ? Si je pouvais aller vous chercher, comme vous seriez bien vite ici.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16361, f. 101-102
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette

a) « tu seras sortie ».

Notes

[1Après leur pèlerinage à la maison des Metz le 26 septembre 1845, Victor Hugo proposa à Juliette Drouet d’acheter cette maison où elle séjourna plusieurs semaines en 1834 et 1835. Mais elle refusa et le projet n’aboutit jamais.

[2À élucider.

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